La petite faucille d’or de notre aïeule Hêna, la vierge de l’île de Sên.
La clochette d’airain laissée par notre aïeul Guilhern, le seul survivant des nôtres à la grande bataille de Vannes : jour funeste, duquel a daté l’asservissement de la Gaule par César, il y a aujourd’hui trois cent vingt ans.
Le collier de fer, signe de la cruelle servitude de notre aïeul Sylvest.
La petite croix d’argent que nous a léguée notre aïeule Geneviève, témoin de la mort de Jésus, le charpentier de Nazareth.
Ces récits, ces reliques, je te les léguerai après moi, mon petit Aëlguen, fils de ma bien-aimée femme Ellèn, qui t’as mis au monde il y a aujourd’hui quatre ans.
C’est ce beau jour, anniversaire de ta naissance, que je choisis, comme un jour d’un heureux augure, mon enfant, afin de commencer, pour toi et pour notre descendance, le récit de ma vie, selon le dernier vœu de notre aïeul Joel, le brenn de la tribu de Karnak.
Tu t’attristeras, mon enfant, quand tu verras par ces récits que, depuis la mort de Joel jusqu’à celle de mon arrière-grand-père Justin, sept générations, entends-tu ? sept générations ! … ont été soumises à un horrible esclavage ; mais ton cœur s’allégera lorsque tu apprendras que mon bisaïeul et mon aïeul étaient, d’esclaves, devenus colons attachés à la terre des Gaules, condition encore servile, mais de beaucoup supérieure à l’esclavage ; mon père à moi, redevenu libre grâce aux redoutables insurrections des Enfants du Gui, soulevés de siècle en siècle à la voix de nos druides, infatigables et héroïques défenseurs de la Gaule asservie, m’a légué la liberté, ce bien le plus précieux de tous ; je te le léguerai aussi.
Notre chère patrie a donc, à force de luttes, de persévérance contre les Romains, successivement reconquis, au prix du sang de ses enfants, presque toutes ses libertés. Un fragile et dernier lien nous attache encore à Rome, aujourd’hui notre alliée, autrefois notre