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pieusement sa souvenance ; aussi, bien souvent Geneviève se disait en soupirant :

— Pauvre jeune maître de Nazareth ! lorsqu’il annonçait qu’un jour les fers des esclaves seraient brisés, il écoutait le vœu de son âme angélique ; mais l’avenir devait démentir cette généreuse espérance.

En effet, lorsque, après deux années passées en Judée avec sa maîtresse Aurélie, Geneviève revint dans les Gaules, elle y retrouva l’esclavage, aussi affreux, plus affreux peut-être que par le passé.

Geneviève a joint à ce récit, qu’elle a écrit pour son mari Fergan, une petite croix d’argent qui lui a été donnée par Jeane, femme du seigneur Chusa, peu de temps après la mort du jeune homme de Nazareth. Quelques personnes (et Jeane était de ce nombre) qui conservaient un pieux respect pour le souvenir de l’ami des affligés, firent fabriquer de ces petites croix en commémoration de l’instrument du supplice de Jésus, et les portèrent ou les distribuèrent, après être allées les déposer au sommet du Calvaire, sur la terre où avait coulé le sang de ce juste.

Geneviève ne sait si elle doit être mère un jour ; si elle a ce bonheur (est-ce un bonheur pour l’esclave de mettre au jour d’autres esclaves ?), elle aura ajouté cette petite croix d’argent aux reliques de famille que doit se transmettre de génération en génération la descendance de Joel, le brenn de la tribu de Karnak.

Puisse cette petite croix être le symbole du futur affranchissement de cette vieille et héroïque race gauloise !… Puissent se réaliser un

    part de ses disciples ; les troupes nombreuses, et en apparence si dévouées, qu’on avait vues de tous côtés accourir à sa voix, s’étaient dispersées ; elles avaient cru à la formation extérieure et soudaine du royaume de Dieu, d’un nouvel état de société qui, selon la parole du Fils de Marie, aurait porté les derniers à la première place ; mais le cours naturel des choses renversait encore leurs espérances et leur faisait confondre le nouveau Christ avec tous les autres messies dont les promesses et les efforts étaient restés sans résultat mémorable. L’émotion produite par la mort de Jésus n’avait laissé dans le pays presque aucune trace ; elle s’était perdue dans une foule d’autres émotions. (Salvador, Jésus-Christ et sa Doctrine, v. 2, p. 212)