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pour monter au Golgotha, colline située hors de la ville et au sommet de laquelle sont dressées les croix des suppliciés.

Geneviève remarqua que la foule, d’abord si lâchement hostile à Jésus, commençait, à mesure qu’approchait l’heure du supplice, à s’émouvoir et à gémir sur le sort de la victime ; ces malheureux comprenaient sans doute, mais, hélas ! trop tard, qu’en laissant mettre à mort l’ami des pauvres et des affligés, non-seulement ils se privaient d’un défenseur, mais que, par leur honteuse ingratitude, ils glaceraient peut-être à l’avenir les âmes généreuses qui se seraient dévouées pour eux.

Lorsque l’on eut passé sous la voûte de la porte Judiciaire, on commença de gravir la montée du Calvaire ; cette pente était si rapide que souvent Simon, le Cyrénéen, toujours chargé de la croix de Jésus, fut obligé de s’arrêter, ainsi que le jeune maître lui-même… Celui-ci semblait avoir à peine conservé assez de forces pour pouvoir atteindre au sommet de cette colline aride, couverte de pierres roulantes, et où croissaient çà et là quelques buissons d’une pâle verdure… Le ciel s’était couvert de nuages épais, un jour sombre, lugubre, jetait sur toutes choses un voile de tristesse… Geneviève, à sa grande surprise, remarqua vers le sommet du Calvaire deux autres croix dressées en outre de celle qui devait être élevée pour Jésus. Dans son étonnement, elle s’informa à une personne de la foule, qui lui répondit :

— Ces croix sont destinées à deux voleurs, qui doivent être crucifiés en même temps que le Nazaréen.

— Et pourquoi supplicie-t-on ces voleurs en même temps que le jeune maître ? — demanda l’esclave.

— Parce que les pharisiens, hommes de justice, de sagesse et de piété, ont voulu que le Nazaréen fût accompagné jusqu’à la mort par ces misérables qu’il fréquentait durant sa vie.

Geneviève se retourna pour savoir qui lui faisait cette réponse ; elle reconnut un des deux émissaires.