que Véronique, sa nourrice, tenant une boutique près la porte Judiciaire, pourrait lui donner un asile.
Mais Geneviève en ce moment ne songea pas à profiter de cette chance de salut. Une force invincible l’attachait aux pas du jeune maître de Nazareth, qu’elle voulait suivre jusqu’à la fin. Elle vit alors Véronique s’approcher en pleurant de Jésus, dont le front était baigné d’une sueur ensanglantée, et essuyer d’une toile de lin le visage du pauvre martyr, qui remercia Véronique par un sourire d’une bonté céleste.
À plusieurs pas de là, et toujours dans la rue qui conduisait à la porte Judiciaire, Jésus passa devant plusieurs femmes qui pleuraient ; il s’arrêta un moment, et dit à ces femmes, avec un accent de tristesse profonde :
« — Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! mais pleurez sur vous-mêmes, pleurez sur vos enfants ; car il viendra un temps où l’on dira : Heureuses les stériles ! Heureuses les entrailles qui n’ont pas porté d’enfants ! Heureuses les mamelles qui n’ont point allaité[1] ! »
Puis Jésus, quoique brisé par la souffrance, se redressant d’un air inspiré, les traits empreints d’une douleur navrante, comme s’il avait conscience des effroyables malheurs qu’il prévoyait, s’écria d’un ton prophétique, qui fit tressaillir les pharisiens eux mêmes :
« — Oui, les temps approchent où les hommes, dans leur effroi, diront aux montagnes : Tombez sur nous !… et aux collines : Couvrez-nous[2] ! »
Et Jésus, baissant la tête sur sa poitrine, poursuivit péniblement sa marche au milieu du silence de stupeur et d’épouvante qui avait succédé à ses paroles prophétiques. Le cortège continuait de gravir la rue rapide qui conduit à la porte Judiciaire, sous laquelle on passe