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pendant que le premier serviteur y versait de l’eau, Ponce-Pilate trempa ses mains dans cette eau, en disant à haute voix :

« — Je suis innocent de la mort de ce juste ; c’est à vous d’y prendre garde… Quant à moi, je m’en lave les mains[1]… »

— Que le sang du Nazaréen retombe sur nous !… — cria l’un des émissaires.

— Oui… que son sang retombe sur nous et sur nos enfants[2] !…

— Prenez donc Jésus, et crucifiez-le vous-mêmes… — répondit Ponce-Pilate. — On va, puisque vous l’exigez, délivrer Barrabas.

Et Ponce-Pilate rentra dans sa maison au bruit des acclamations de la foule, tandis que Caïphe, le docteur Baruch, le banquier Jonas et les autres pharisiens triomphants montraient le poing à Jésus.

L’officier qui avait commandé l’escorte de miliciens chargés d’arrêter le fils de Marie dans le jardin des Oliviers, s’approchant de Caïphe, lui dit :

— Seigneur, pour conduire le Nazaréen au Golgotha, lieu de l’exécution des criminels, nous aurons à traverser le quartier populeux de la porte Judiciaire ; il se pourrait que le calme des partisans de ce séditieux ne fût qu’apparent… et qu’une fois arrivés dans ce quartier de vile populace, elle ne se soulevât pour délivrer le Nazaréen… Je réponds du courage de mes braves miliciens ; ils ont déjà, ce matin, après un combat acharné, mis en fuite une grosse troupe de scélérats déterminés, commandée par un bandit nommé Banaïas, qui voulaient nous forcer à leur livrer Jésus… Pas un de ces misérables n’a échappé… malgré leur furieuse résistance…

— Le lâche menteur ! — se dit Geneviève en entendant cette vanterie de l’officier des miliciens, qui reprit :

— Cependant, seigneur Caïphe, malgré la vaillance éprouvée de notre milice, il serait peut-être plus prudent de confier l’escorte du Nazaréen, jusqu’au lieu du supplice, à la garde romaine.

  1. Évangile selon saint Matthieu, ch. XVIII, v. 25.
  2. Évangile selon saint Matthieu, ch. XVIII, v. 26, 27.