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tout s’évanouit, elles disparaissent dans la fontaine pour retourner au fond de l’onde, dans leur palais de cristal et de corail… c’est afin de pouvoir se sauver ainsi qu’elles restent toujours au bord des eaux. Ô gentilles naines… belles petites fées… ne vous verrai-je donc jamais ! je donnerais dix ans, vingt ans de ma vie pour rencontrer une Korrigan !…

— Karadeuk, mon enfant, ne faites pas de ces vœux impies par une pareille nuit de tempête… cela porte malheur… jamais je n’ai entendu la mer en furie gronder ainsi… c’est comme un tonnerre…

— Ma bonne mère, je braverais nuit, tempête et tonnerre pour voir une Korrigan…

— Taisez-vous, méchant enfant… taisez-vous, vous m’effrayez… ne parlez pas ainsi… c’est tenter Dieu !

— Quel aventureux et hardi garçon tu fais, mon petit-fils…

— Grand-père, blâmez donc aussi mon frère Karadeuk, au lieu de l’encourager dans ses désirs périlleux… Ne savez-vous pas…

— Quoi ! ma blonde Roselyk ?

— Hélas ! grand-père, les Korrigans volent les enfants des pauvres mères, et mettent à leur place de petits monstres ; la chanson le dit.

— Voyons la chanson, ma Roselyk.

— La voici, grand-père :




« — Mary, la belle, est bien affligée ; elle a perdu son petit Laoïk ; la Korrigan l’a emporté.




» — En allant à la fontaine puiser de l’eau, je laissai mon Laoïk dans son berceau ; quand je revins à la maison, il était bien loin.




» — Et à sa place la Korrigan avait mis ce monstre ; sa face est