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ou massacré par l’armée, prévenue et soulevée à temps par tes émissaires…

— Des preuves, Victoria ! des preuves !…

— Je n’en ai pas… mais cela est ! Dans la même nuit, tu as fait tuer mon petit-fils entre mes bras : ma race a été éteinte… ton premier pas vers l’empire était marqué dans le sang. Tu as ensuite refusé le pouvoir et proposé l’élévation de Marion… Oh ! je l’avoue, à ce prodige d’astuce infernale, mes soupçons, un moment éveillés, se sont évanouis… Deux mois après son acclamation comme chef de la Gaule… Marion tombait sous le fer d’un meurtrier, ton instrument.

— Des preuves… — reprit Tétrik impassible, — des preuves !…

— Je n’en ai pas, mais cela est… Tu restais seul : Victorin, son fils, Marion, tués… Alors, devenue, sans le savoir, ta complice, je t’ai adjuré de prendre le gouvernement du pays… Tu triomphais, mais à demi… tu gouvernais, mais, tu l’as dit, tu n’étais que mon premier sujet, à moi, la mère des camps… Oh ! je le vois à cette heure, mon pouvoir te gêne ! l’armée, la Gaule, t’ont accepté pour leur chef, présenté par moi ; elles ne t’ont pas choisi… D’un mot je peux te briser comme je t’ai élevé… Aveuglé par l’ambition, tu as jugé mon cœur d’après le tien ; tu m’as crue capable de vouloir changer mon influence sur l’armée contre la couronne d’impératrice, et d’introniser à ce prix toi et ta race… Tu as conclu avec le pape et les évêques un pacte ténébreux, dans l’espoir d’asservir un jour cet intelligent et fier peuple gaulois, qui, libre, choisit librement ses chefs, et reste fidèle à la religion de ses pères. Quoi ! il a brisé depuis des siècles, par les mains sacrées de Ritha-Gaür, le joug des rois… et tu voudrais de nouveau lui imposer ce joug, en t’alliant avec la nouvelle Église ?… Eh bien, moi, Victoria, la mère des camps, je te dis ceci à toi Tétrik, chef de la Gaule : Devant le peuple et l’armée, je t’accuse de vouloir asservir la Gaule ! je t’accuse d’avoir renié la foi de tes pères ! je t’accuse d’avoir contracté une secrète alliance avec les évêques ! je t’accuse de vouloir usurper la cou-