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nelles… puisque les évêques doivent glorifier ma conversion à la face de l’univers… Vraiment, ma faible intelligence, encore fermée à la lumière de la foi nouvelle, ne peut, je vous l’avoue, Tétrik, comprendre ces contradictions étranges.

— Rien de plus simple cependant.

— À mon tour, je vous écoute.

— L’Évangile du Seigneur

— De quel Seigneur parlez-vous, Tétrik ?

— De notre seigneur Jésus-Christ, le fils de Dieu, ou plutôt Dieu lui-même en personne.

— Que les temps sont changés !… Durant sa vie, le jeune homme de Nazareth ne s’appelait pas seigneur… loin de là, il disait : « Le maître n’est pas plus que le disciple… l’esclave est autant que son seigneur… » Il se disait fils de Dieu, de même que notre foi druidique nous apprend que nous sommes tous fils d’un même Dieu…

— Les temps sont changés… vous avez raison, Victoria… Pris en un sens absolu, l’Évangile de Notre-Seigneur Jésus-Christ ne serait, vous l’avouerez, qu’une machine d’éternelle rébellion du pauvre contre le riche, du serviteur contre son maître, du peuple contre ses chefs, la négation enfin de toute autorité ; tandis que les religions, au contraire, doivent rendre l’autorité plus puissante, plus redoutable…

— Je sais cela… Nos druides, au temps de leur barbarie primitive, et avant de devenir les plus sublimes des hommes, se sont aussi rendus redoutables aux peuples ignorants, alors qu’ils les frappaient de terreur et les écrasaient sous leur pouvoir ; mais le jeune maître de Nazareth a flétri ces fourberies atroces en disant avec indignation aux princes des prêtres : « Vous voulez faire porter aux hommes des fardeaux écrasants, que vous ne touchez pas, vous, prêtres du bout du doigt… »

— Encore une fois, Victoria, là n’est point du tout le bon côté de l’Évangile de notre Seigneur.