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— Tu veux mourir… tu t’es donc frappé toi-même de ton épée ?

— Tu l’as dit.

— Non, tu me trompes… ton épée est à ton côté… dans son fourreau…

— Que t’importe ? va-t’en !…

— Tu as été frappé par un meurtrier, — ai-je repris en courant ramasser une épée sanglante encore, que je venais d’apercevoir à peu de distance. — voici l’arme dont on s’est servi contre toi.

— Je me suis battu en loyal combat… laisse-moi !…

— Tu ne t’es pas battu, tu ne t’es pas frappé toi-même. Ton épée, je le répète, est à ton côté, dans son fourreau… Non, non, tu es tombé sous les coups d’un lâche meurtrier… Marion, laisse-moi visiter ta plaie ; tout soldat est un peu médecin… il suffirait peut-être d’arrêter le sang…

— Arrêter le sang ! — cria Marion en me jetant un regard furieux. — Viens un peu essayer d’arrêter mon sang, et tu verras comme je te recevrai…

— Je tenterai de te sauver, — lui dis-je, — et malgré toi, s’il le faut…

En parlant ainsi, je m’étais approché de Marion, toujours étendu sur le dos ; mais au moment où je me baissais vers lui, il replia ses deux genoux sur son ventre, puis il me lança si violemment ses deux pieds dans la poitrine, que je fus renversé sur l’herbe, tant était grande encore la force de cet Hercule expirant.

— Voudras-tu encore me secourir malgré moi ? — me dit Marion pendant que je me relevais, non pas irrité, mais désolé de sa brutalité ; car, aurais-je eu le dessus dans cette triste lutte, il me fallait renoncer à venir en aide à Marion.

— Meurs donc, — lui ai-je dit, — puisque tu le veux… meurs donc, puisque tu oublies que la Gaule a besoin de tes services ; mais ta mort sera vengée… on découvrira le nom de ton meurtrier…

— Il n’y a pas eu de meurtrier… je me suis frappé moi-même…