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Et tournant la tête du côté de la porte de la rue, elle vit au loin Pierre, toujours assis sur un banc, la figure cachée entre ses mains et n’ayant pas même le courage de venir assister et défendre son doux maître devant ce tribunal de sang.

Le tumulte soulevé par la violence de l’huissier étant un peu apaisé, l’un des émissaires reprit d’une voix éclatante :

— Je jure, enfin, que cet homme-ci a épouvantablement blasphémé en disant qu’il était le Christ, le fils de Dieu !

Alors Caïphe s’adressant à Jésus, reprit d’un ton plus menaçant encore :

— Vous ne répondez rien à ce que ces personnes disent de vous[1] ?

Mais le jeune maître haussa légèrement les épaules et continua de garder le silence.

Ce silence irrita Caïphe, il se leva de son siège et s’écria, en montrant le poing au fils de Marie :

— De la part du Dieu vivant, je vous ordonne de nous dire si vous êtes le Christ, le fils de Dieu[2].

— « Vous l’avez dit… je le suis[3]. » — répondit le jeune maître en souriant.

Geneviève avait entendu Jésus dire, qu’ainsi que tous les hommes, ses frères, il était fils de Dieu ; de même aussi que les druides nous enseignent que tous les hommes sont fils d’un même Dieu. Quelle fut donc la surprise de l’esclave, lorsqu’elle vit le prince des prêtres, dès que Jésus lui eut répondu qu’il était fils de Dieu, se lever, déchirer sa robe avec toutes les marques de l’épouvante et de l’horreur, s’écriant en s’adressant aux membres du tribunal :

— Il a blasphémé… qu’avons-nous plus besoin de témoins ? Vous venez vous-mêmes de l’entendre blasphémer, qu’en jugez-vous ?

— Il a mérité la mort[4] !

  1. Évangile selon saint Matthieu, ch. XXXVI, v. 62.
  2. Évangile selon saint Matthieu, ch. XXXVI, v. 63.
  3. Évangile selon saint Matthieu, ch. XXXVI, v. 64.
  4. Évangile selon saint Matthieu, ch. XXXVI, v. 65, 66.