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nièrement de chez moi, apprenant, par hasard, qu’en effet, irrité contre Victorin, qui, plusieurs fois ici l’avait raillé, il s’était vengé en répandant sur lui des calomnies encore plus ridicules qu’odieuses ; mais laissons ces misères… Je suis ambitieux, dites-vous, ami Scanvoch ? je vise au gouvernement de la Gaule, dussé-je y arriver par d’indignes manœuvres ?… Demandez à Victoria quel est le but de mon nouveau voyage à Mayence…

– Tétrik pense qu’il serait urgent pour la paix et la prospérité de la Gaule de proposer aux soldats d’acclamer le fils de mon fils comme héritier du gouvernement de son père… Tétrik se croit certain du consentement de l’empereur Galien.

– Tétrik prévoit donc la mort prochaine de Victorin ? — ai-je répondu regardant fixement le gouverneur.

Mais celui-ci, dont on rencontrait rarement les yeux qu’il tenait ordinairement baissés, répondit :

– Les Franks sont de l’autre côté du Rhin… et Victorin est d’une bravoure téméraire ; mon vif désir est qu’il vive de longues années ; mais, selon moi, la Gaule trouverait un gage de sécurité pour l’avenir, si elle savait qu’après Victorin le pouvoir restera au fils de celui que l’armée a acclamé comme chef, surtout lorsque cet enfant aurait eu pour éducatrice Victoria la Grande… Victoria, l’auguste mère des camps !…

– Oui, — ai-je répondu en tâchant de nouveau, mais en vain, de rencontrer le regard du gouverneur ; — mais dans le cas où Victorin mourrait prochainement, qui me dit que vous, Tétrik, vous n’espérez pas être le tuteur de cet enfant, exercer le pouvoir en son nom, et arriver ainsi, par une autre voie, au gouvernement de la Gaule ?

– Parlez-vous sérieusement, Scanvoch ? — reprit Tétrik. — Demandez à Victoria si elle a besoin de mon aide pour faire de son petit-fils un homme digne d’elle et du pays ?… La croyez-vous de ces femmes assez faibles pour partager avec autrui une tâche glorieuse ? L’idolâtrie des soldats, pour elle ne vous est-elle pas un sûr garant