– Sa bravoure, sa générosité, sa franchise, n’ont pas dégénéré…
– Sa bravoure n’est plus cette calme et prévoyante bravoure qui sied à un général… elle devient aveugle… folle… Sa générosité ne choisit plus entre les dignes et les indignes ; sa raison faiblit, le vin et la débauche le perdent… Par Hésus ! ivrogne et débauché !… lui, mon fils ! l’un des deux chefs de notre Gaule, aujourd’hui libre… et demain peut-être sans égale parmi les nations du monde… Scanvoch, je suis une malheureuse mère !…
– Victorin m’aime… je lui dirai de paternelles, mais sévères paroles…
– Crois-tu donc que tes paroles feront ce que n’ont pas fait les paroles de sa mère ? de celle-là qui depuis plus de vingt ans ne l’a pas quitté, le suivant aux armées, souvent à la bataille ? Scanvoch, Hésus me punit… j’ai été trop fière de mon fils…
– Et quelle mère n’eût pas été fière de lui, ce jour où toute une vaillante armée acclamait librement pour son chef ce général de vingt ans, derrière lequel on voyait… vous, sa mère !
– Et qu’importe ! s’il me déshonore !… Et pourtant ma seule ambition était de faire de mon fils un citoyen, un homme digne de nos pères !… En le nourrissant de mon lait, ne l’ai-je pas aussi nourri d’un ardent et saint amour pour notre Gaule renaissante à la vie, à la liberté !… Qu’est-ce que j’ai toujours voulu, moi ? Vivre obscure, ignorée, mais employer mes veilles, mes jours, mon intelligence, ma science du passé, qui me donne la conscience du présent, et parfois la connaissance de l’avenir… employer enfin toutes les forces de mon âme et de mon esprit à rendre mon fils vaillant, sage, éclairé, digne en tout de guider les hommes libres qui l’ont librement élu pour chef… Et alors, Hésus m’en est témoin ! fière comme Gauloise, heureuse comme mère d’avoir enfanté un tel homme, j’aurais joui de sa gloire et de la prospérité de mon pays du fond de ma retraite… Mais avoir un fils ivrogne et débauché ! Courroux du ciel ! Cet insensé ne comprend donc pas qu’à chaque excès il soufflette sa mère !… S’il