– Cette blessure, — reprit Néroweg en portant son doigt à la profonde cicatrice dont sa joue était sillonnée, — cette blessure, la reconnais-tu ?
– Oui, c’est mon œuvre… Je t’ai combattu en soldat…
– Tu mens !… tu m’as combattu en lâche… deux contre un…
– Tu attaquais avec furie le fils de Victoria, la grande ; il était déjà blessé… sa main pouvait à peine soutenir son épée… je suis venu à son aide…
– Et tu m’as marqué à la face de ton sabre gaulois !… chien…
En disant cela, Néroweg m’asséna plusieurs coups du manche de sa pique, à la grande risée des autres rois.
Je me rappelai mon aïeul Guilhern, enchaîné comme esclave, et supportant avec dignité les lâches et cruels traitements des Romains, après la bataille de Vannes… Je l’imitai, je dis simplement à Néroweg :
— Tu frappes un soldat désarmé, garrotté, qui, confiant dans la trêve, est venu pacifiquement vers toi… c’est une grande lâcheté !… Tu n’oserais pas lever ton bâton sur moi, si j’étais debout, une épée à la main…
Le chef Frank se mettant à rire d’un rire cruel et grossier, me répondit :
– Fou est celui qui, pouvant tuer son ennemi désarmé, ne le tue pas… Je voudrais pouvoir te tuer deux fois… Tu es doublement mon ennemi… Je te hais parce que tu es Gaulois ; je te hais parce que ta race possède la Gaule, le pays du soleil, du bon vin et des belles femmes… je te hais parce que tu m’as marqué à la face, et que cette blessure fait ma honte éternelle… Je veux donc te faire tant souffrir, que tes souffrances vaillent deux morts, mille morts, si je peux… chien gaulois !…
– Le chien gaulois est un noble animal de chasse et de guerre, — lui dis-je ; — le loup frank est un animal de rapine et de carnage, mais avant peu les braves chiens gaulois auront chassé de leurs fron-