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ment dans la profondeur d’une cicatrice commençant au-dessous de l’œil et allant se perdre dans sa barbe hérissée. De lourdes plaques d’or grossièrement travaillées, attachées à ses oreilles, les distendaient et tombaient sur ses épaules, un gros collier d’argent faisait deux ou trois fois le tour de son cou et tombait jusque sur sa poitrine demi-nue. Il avait pour vêtement, par-dessus sa tunique de toile, presque noire tant elle était malpropre, un casque de peau de bête. Ses chausses, de même étoffe et de même saleté que sa tunique, la rejoignaient et y étaient assujetties par un large ceinturon de cuir où pendaient, d’un côté, une longue épée, de l’autre une hache de pierre tranchante ; de larges bandes de peau tannée (de peau humaine peut-être) se croisaient sur ses chausses, depuis le cou-de-pied jusqu’au dessus du genou ; il s’appuyait sur une demi-pique armée d’un fer aigu. Les autres rois qui accompagnaient Néroweg étaient à peu près tatoués, vêtus et armés comme lui, tous avaient les traits empreints d’une gravité farouche.

Elwig, toujours agenouillée silencieusement près de moi, avait jusqu’alors caché ma figure à Néroweg. Il toucha brutalement, du bout du manche de sa pique, les épaules de sa sœur, et lui dit durement :

– Pourquoi m’as-tu envoyé quérir avant de faire bouillir pour tes augures ce chien gaulois… dont mes écorcheurs voulaient me donner la peau ?

– L’heure n’est pas propice, — reprit la prêtresse d’un ton mystérieux et saccadé ; — l’heure de la nuit… de la nuit noire, vaut mieux pour sacrifier aux dieux infernaux… Ce Gaulois dit avoir été chargé d’un message pour toi, ô puissant roi ! par Victoria et par son fils.

Néroweg s’approcha davantage et me regarda d’abord avec une dédaigneuse indifférence ; puis, m’examinant plus attentivement, et se baissant pour mieux m’envisager, ses traits prirent soudain une expression de haine et de rage triomphante, et il s’écria, comme s’il ne pouvait en croire ses yeux :