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CHAPITRE V.


L’esclavage. — Guilhern à la chaîne. — Le maquignon. — Perce-Peau, l’esclave de réjouissance. — Sous quels numéro, nom et enseigne doit être vendu Guilhern. — Il craint que ses deux enfants, son fils Sylvest et sa fille Siomara, n’aient échappé à la mort sur le chariot de guerre. — Ce que l’on faisait des enfants esclaves. — Le maquignon parle à Guilhern du seigneur Trymalcion, riche vieillard qui achète beaucoup d’enfants. — Épouvante de Guilhern à ces monstruosités.




Après que j’eus vu ma mère et les femmes de ma famille et de ma tribu se tuer et s’entre-tuer sur le chariot de guerre, pour échapper à la honte et aux outrages de la servitude, la perte de mon sang me priva de tout sentiment:il se passa un assez long temps pendant lequel je n’eus pas la plénitude de ma raison ; lorsqu’elle me revint, je me trouvai couché sur la paille, ainsi qu’un grand nombre d’hommes, dans un vaste hangar. À mon premier mouvement, je me suis senti enchaîné par une jambe à un pieu enfoncé en terre ; j’étais à demi vêtu, l’on m’avait laissé ma chemise et mes braies, où j’avais caché dans une poche secrète les écrits de mon père et d’Albinik, mon frère, ainsi que la petite faucille d’or, don de ma sœur Hêna, la vierge de l’île de Sên; un appareil avait été mis sur mes blessures, elles ne me faisaient presque plus souffrir, je ne ressentais qu’une grande faiblesse et un étourdissement qui rendait confus mes derniers souvenirs. J’ai regardé autour de moi : nous étions là peut-