core plus peureuse que curieuse… Pensez donc, des femmes de notre condition dans cette horrible taverne où se rassemble, dit-on, la lie de la populace !
— N’ayez aucune crainte ; ces gens sont plus turbulents et plus effrayants à voir que vraiment méchants… Déjà je suis allée deux fois parmi eux sous ce déguisement, avec une de mes parentes, pour entendre le jeune maître… Cette taverne est très-peu éclairée ; il règne autour de la cour une galerie sombre où nous ne serons pas vues ; nous demanderons un pot de cervoise, et l’on ne fera pas attention à nous ; on ne s’occupe que du jeune maître de Nazareth, ou, en son absence, de ses disciples, qui viennent prêcher la bonne nouvelle… Venez, Aurélie… il se fait tard… venez…
— Écoutez ! écoutez ! — dit la jeune femme à Jeane en prêtant l’oreille du côté de la taverne avec inquiétude. — Entendez-vous ces cris ! On se dispute dans cette horrible lieu !…
— Cela prouve que le jeune maître n’y est pas encore arrivé, — reprit Jeane ; — car, en sa présence, toutes les voix se taisent, et les plus violents deviennent doux comme des agneaux.
— Et puis, tenez, Jeane, voyez donc ce groupe d’hommes et de femmes de mauvaise mine réunis devant la porte, à la lueur de cette lanterne… De grâce, attendons qu’ils soient passés ou entrés dans la taverne.
— Venez… il n’y a rien à craindre, vous dis-je…
— Non… je vous en prie, Jeane, un moment encore… En vérité, j’admire votre bravoure !
— Oh ! c’est que Jésus de Nazareth inspire le courage comme il inspire la mansuétude pour les coupables… la tendresse pour ce qui souffre… Et puis, si vous saviez comme son langage est naturel ! quelles touchantes et ingénieuses paraboles il trouve pour mettre sa pensée à la portée de ces hommes simples, de ces pauvres d’esprit, comme il les appelle, et qu’il aime tant ! Aussi, tous, jusqu’aux petits enfants, pour lesquels il a un si grand faible, comprennent sa parole,