— Près la porte des Brebis ?
— Justement… Ce jour-là était jour de sabbat ; or, vous savez, mes seigneurs, combien est solennelle et sacrée l’interdiction de faire quoi que ce soit le jour du sabbat !
— Pour tout homme religieux, c’est commettre une terrible impiété.
— Maintenant, jugez la conduite du Nazaréen, — reprit Caïphe. — Il va à la piscine, et notez, en passant, que, par une astuce scélérate et pour ruiner les médecins, il ne reçoit jamais un denier pour ses guérisons, car il est fort versé dans l’art de guérir.
— Comment voulez-vous, seigneur Caïphe, qu’un homme qui ne respecte rien respecte même les médecins ?…
— Le Nazaréen arrive donc à la piscine ; il y trouve, entre autres, un homme qui avait le pied démis, il le lui remet…
— Quoi ! le jour du sabbat ?
— Il aurait osé ?…
— Abomination de la désolation !…
— Guérir un malade le jour du sabbat… sacrilège !…
— Oui, mes seigneurs, — répondit le prince des prêtres d’une voix lamentable ; — il a commis ce sacrilège[1] !
— Si encore ce jeune homme n’avait pas guéri le malade, — dit tout bas Aurélie à Jeane en souriant, — je concevrais leur colère…
— Une telle impiété, — ajouta le docteur Baruch, — une telle impiété mériterait le dernier supplice[2], car il est impossible d’outrager plus abominablement la religion !…
— Et ne croyez pas, — reprit Caïphe, — que le Nazaréen se cache
- ↑ Cet homme s’en alla dire aux Juifs que c’était Jésus qui l’avait guéri, et c’est pour cette raison que les Juifs persécutaient Jésus et qu’ils cherchaient à le faire mourir, parce qu’il faisait ces choses le jour du sabbat. (Évangile selon saint Luc, ch. V, v. 15-16.)
- ↑ Mais les Juifs cherchaient encore avec plus d’ardeur à le faire mourir, parce que non-seulement il ne gardait pas le sabbat, mais qu’il disait même que Dieu était son père, se faisant ainsi égal à Dieu. (Évangile selon saint Luc, ch. V, v. 18.)