Sylvest vit, entre autres, horrible souvenir ! un lion énorme, fauve, à crinière presque noire, se précipiter sur le gaulois ami de Quatre-Épices… Afin de mourir plus vite, ce malheureux s’était jeté à genoux ; seulement, dans son épouvante, il cachait sa figure entre ses deux mains pour ne pas voir le monstre… Le lion, d’un coup de patte sur le haut du crâne, le jeta la face contre terre et l’y contint ; puis, lui plantant les ongles de son autre patte dans les reins, il l’attira transversalement à lui, et, le maintenant ainsi, il ne se hâta pas de le dévorer… Haletant, essoufflé, il s’étendit de toute sa longueur le ventre sur le sable, et appuya pendant un instant sur le corps de l’esclave sa tête monstrueuse, dont la gueule béante et la langue pendante ruisselaient d’une écume ensanglantée… Le gaulois n’était pas mort ; il poussait des cris inarticulés ; ses bras, ses jambes s’agitaient et battaient le sol ; aux contorsions de tout son corps, on voyait qu’il s’efforçait, mais en vain, d’échapper à une torture atroce… Soudain la crinière du lion se hérissa ; il fouetta le sable à grands coups de queue ; sa large croupe se releva, quoiqu’il tint toujours le Gaulois sous ses pattes de devant ; puis, baissant brusquement la tête, il mordit sa proie au milieu de l’échine, et, tout en la broyant sous ses crocs, il poussa des grondements irrités… Un tigre moucheté de jaune et de noir, aussi énorme que le lion, venait lui disputer sa victime… Le lion, sans démordre, levant la patte dont les ongles avaient jusqu’alors labouré le crâne de l’esclave, les enfonça dans le mufle du tigre… Celui-ci, malgré cette blessure, ouvrit la gueule, saisit entre ses dents la tête du Gaulois que le lion contenait de son autre patte, et, la croupe haute, le mufle abaissé, s’arc-boutant sur ses pattes de devant, la tigre tira violemment cette tête à lui en rugissant, tandis que le lion, ne démordant pas le milieu du corps, où s’enfonçaient ses crocs, tirait de son côté… Tous deux, d’accroupis, se levèrent pour finir de s’entr’arracher ce corps. L’esclave n’avait pas encore cessé de vivre… Soulevé de terre par les deux bêtes féroces qui se le disputaient, il raidissait encore convulsivement, de