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dont les yeux sont bandés. Il tomba ainsi entre les bras d’un des hérauts, qui le conduisit hors de l’arène au milieu des huées universelles…

L’arène restant vide un moment, l’esclave, ami de Quatre-Épices, dit à Sylvest et à ses compagnons :

— Voyez donc le Diavole et ses amis… comme leur pâleur augmente et devient verdâtre ; l’on dirait que leurs yeux se renfoncent dans l’ombre de leur orbite, qui va toujours se creusant !… Courroux du ciel !… le poison de Quatre-Épices est d’un effet certain ; mais ces joyeux seigneurs n’éprouvent encore sans doute aucune douleur ? Cependant, voici l’un d’eux qui porte la main à son front ; sa tête alourdie semble lui peser…

— Et cet autre… qui vient de se rasseoir en cachant ses yeux comme s’il était ébloui ou étourdi ?

Un grand frémissement se fit alors dans la foule ; les noms de Faustine et de Siomara, circulant dans toutes les bouches, arrivèrent jusqu’aux oreilles de Sylvest, comme s’ils eussent été prononcés par une seule et grande voix composée de ces milliers de voix !

Hélas ! Siomara lui inspirait autant d’horreur que d’épouvante ; mais en ce moment, suprême… où il allait entrevoir sa sœur pour la dernière fois… il oublia la courtisane, la magicienne, il ne se souvint plus que de l’innocente enfant d’autrefois, la douce compagne de sa première jeunesse !

Les buccinateurs sonnèrent une fanfare ; tous les spectateurs se levèrent et se penchèrent avidement vers l’arène, s’écriant d’une voix palpitante d’impatience et de curiosité :

— Les voilà !… les voilà !…

Un instant cette attente fut trompée… cette fanfare n’annonçait pas encore l’entrée de Siomara et celle de Faustine, mais Mont-Liban, qui les précédait, non pour se battre à mort avec le célèbre Bibrix, car il était seul, et le combat des deux gladiateurs ne devait avoir lieu qu’après celui de la courtisane et de la grande dame… que venait