Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/210

Cette page a été validée par deux contributeurs.

statues de marbre placées dans les niches de la muraille d’enceinte, et représentant des divinités païennes ; il semblait se mettre sous sa protection… Mais, à un des signes des édiles, les Mercures, retirant du brasier leurs longues tiges d’airain, en menacèrent le vieillard et les esclaves agenouillés… Ainsi placés entre la crainte de ces horribles brûlures et la crainte d’un combat à mort, ils se résignèrent à la lutte… Elle commença : les uns combattirent avec la furie du désespoir, heureux de trouver dans la mort la fin de leurs misères ; d’autres, à la première blessure, s’agenouillèrent et, hâtés d’en finir, tendirent la gorge à leur adversaire, forcé de les tuer (en attendant qu’il fût tué lui-même), aux grands applaudissements du public… Ceux-ci, couverts de blessures, se traînant à peine, levaient, selon l’usage, la paume de la main gauche vers les spectateurs, pour demander grâce de la vie, oubliant que les seuls gladiateurs de profession avaient ce droit, et que tout esclave entrant dans l’arène n’en sortait que mort, tué par l’épée ou la tête broyée sous le marteau des Plutons. Plusieurs, enfin, grièvement blessés, feignirent d’être morts. L’un de ceux-ci, jeune et vigoureux esclave, avait vaillamment combattu : son corps était criblé de blessures ; au dernier choc, il tomba non loin des barreaux de la voûte où se trouvait Sylvest. Lui-même crut cet esclave mort : les membres roidis, la tête couverte de son casque à visière baissée renversée sur le sable, il restait immobile… Un des Mercures l’aperçut, s’approcha de lui armé de sa longue tige d’airain rouge comme un charbon ardent, et en sillonna une des plaies de l’esclave… La chair vive grésilla, fuma… le corps resta sans mouvement malgré cette torture… Le Mercure le crut mort ; il s’éloigna… mais, se ravisant, il revint, plongea sa tige d’airain à travers l’un des deux trous de la visière du casque du gladiateur… Sans doute le fer brûlant et aigu pénétra dans l’œil, car l’esclave, vaincu cette fois par la douleur, se releva d’un bond en poussant des hurlements qui n’avaient rien d’humain, fit quelques pas et retomba ; aussitôt deux Plutons accoururent vers lui, et frappant de leurs lourds