Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 2.djvu/199

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Pure comédie, mais c’est la mode… Il se battra, lui, armé jusqu’aux dents, contre un esclave armé à blanc (D), comme on dit au cirque, c’est-à-dire nu et armé d’un sabre de fer blanc, sans pointe ni tranchant ; nos jeunes seigneurs se donnent ces divertissements… Ensuite viendra le combat de femmes dont je t’ai parlé, car décidément il aura lieu.

— Entre qui ?

— Entre deux des plus belles femmes d’Orange… une grande dame et une célèbre courtisane affranchie…

— Leur nom ? — demanda Sylvest avec anxiété, — oh ! leur nom… le sais-tu ?

— La grande dame est Faustine, patricienne de cette ville… La courtisane affranchie est depuis peu à Orange ; elle se nomme la belle Gauloise… Ensuite, nous aurons un combat à mort entre le fameux Mont-Liban et Bibrix, le plus célèbre gladiateur de Nîmes… Enfin, pour terminer la fête, les esclaves seront livrés aux bêtes… et, à ce propos, mon fils, n’oublie pas mes conseils selon l’encontre d’un lion, d’un tigre ou d’un éléphant ; quant au crocodile, je ne peux te donner d’avis.

Sylvest resta seul ; il venait d’apprendre avec surprise l’annonce du combat de Siomara et de Faustine. Pour quelle cause ces deux femmes devaient-elles se battre ? Mont-Liban était-il l’objet de cette rivalité ? Sylvest hésitait à le croire : il se rappelait avec quel dédain Siomara avait traité le gladiateur, quoiqu’elle l’eût congédié en lui adressant quelques douces paroles… Mais, depuis cette nuit-là, trois jours s’étaient passés : Siomara avait peut-être pris Mont-Liban pour amant, par haine contre Faustine plutôt que par amour pour ce gladiateur stupide et brutal ; car Sylvest se souvenait des aveux de Siomara se jetant dans les sortilèges par satiété de débauche… il se souvenait enfin en frémissant et sans vouloir y croire, de l’horrible révélation de l’eunuque au sujet de Belphégor… D’ailleurs, il ne s’étonnait pas de voir la noble Faustine franchir, pour ce combat,