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Siomara c’est la personnification de l’épouvantable dépravation où nous plonge presque forcément l’esclavage lorsqu’il nous prend jeunes, et surtout lorsque, au lieu d’être rude et cruel, il caresse le corps par toutes les jouissances du luxe, et empoisonne à jamais l’âme par une corruption précoce. L’esclave, voué aux plus pénibles labeurs, battu, torturé, retrempe incessamment son énergie dans la douleur, dans la haine ; le sentiment de sa dignité n’est pas éteint en lui, car il songe à la révolte ! Et cette horreur de l’oppression, seule vertu de l’esclavage, l’esclave amolli, énervé par d’infâmes délices, la perd, cette vertu ; et souvent, par ses crimes, il égale et dépasse ses maîtres.

Siomara, achetée tout enfant et élevée par un vieillard infâme, dont la monstruosité semblait aller au-delà des limites du possible, devait imiter Trymalcion… elle l’a surpassée…

Honte et malheur à notre race ! mais l’esclave Siomara n’avait pas le choix entre le bien et le mal ; la noble Faustine, libre et riche, pouvait choisir entre le bien et le mal.

L’une est devenue un monstre par condition, l’autre par nature.