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d’une courtisane gauloise arrivée depuis peu à Orange, sans savoir d’autres détails sur elle ; mais, en apprenant par la sorcière que cette courtisane venait d’Italie, qu’elle avait vingt-cinq à vingt-six ans, les cheveux blonds et les yeux noirs, il se souvint que sa sœur Siomara, autrefois vendue toute enfant, après la bataille de Vannes, au seigneur Trymalcion, partant alors pour l’Italie, il se souvint que sa sœur devait être aussi âgée de vingt-cinq à vingt-six ans et avait aussi les cheveux blonds et les yeux noirs… Un horrible pressentiment traversa l’esprit de Sylvest ; il écouta la sorcière avec un redoublement d’angoisse.

Faustine, de plus en plus sombre et sinistre, à mesure que la vieille parlait de la rare beauté de la courtisane gauloise, Faustine, les yeux fixes, son front appuyé sur sa main, écoutait, sans l’interrompre, la Thessalienne. Celle-ci poursuivit au milieu du profond silence des esclaves, considérés par leur maîtresse, et selon l’habitude, comme n’ayant pas plus d’importance que des animaux familiers, avec qui et devant qui l’on fait tout, l’on dit tout, l’on ose tout…

— La belle Gauloise !… oh ! oh ! j’en sais long sur elle… grâce à mes secrets magiques ! — ajouta la Thessalienne d’un air mystérieux. — Ça été un beau jour pour moi quand j’ai appris sa venue à Orange !

Et, éclatant d’un rire singulier, qui fit tressaillir la grande dame, l’humble vieille s’écria :

— Ah ! ah ! ah ! belle Gauloise !… belle adorée !… tu verras une nuit… par une nuit profonde comme la tombe… tu verras que la poule noire a couvé des œufs de serpent !

Sylvest ne comprit pas ces mots étranges, mais l’expression de la Thessalienne l’épouvanta.

— Parle plus clairement, — lui dit Faustine ; — que signifient ces paroles mystérieuses ?

La sorcière secoua la tête et reprit :

— L’heure n’est pas venue de t’en dire davantage… Mais ce que je peux t’apprendre, et cela n’est pas un secret… c’est que la belle