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être reçu de la sorte par les sérénissimes alliés de Sa Majesté le roi de France… Ah, ah, ah ! mon pauvre vidame de Bussy ! Hi, hi, hi ! que ton air est piteux ! Si tu voyais ta figure… couronnée… de ton bandeau… oh, oh, oh ! Tu es à peindre… tu as l’air d’un vieux Cupidon… Ah, ah, ah ! oh ! la rate… je crèverai… de rire… si je ne meurs d’une balle républicaine.

— Fasse le ciel que je trouve aujourd’hui la fin de ma triste vie… C’est trop… oh ! c’est trop de misère et de honte ! — dit d’une voix sourde le vieux gentilhomme campagnard sans s’arrêter aux lazzi du marquis. Il s’adresse ainsi aux autres émigrés, non moins courroucés que lui :

— Allons nous faire tuer pour le roi… là… où l’on nous le permettra, messieurs !!

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Le régiment de Gerolstein, le prince en tête, s’ébranle et part au grand trot. Le sol tremble sous les pieds de ces huit cents chevaux ; le cliquetis des sabres, des mousquetons et des cuirasses retentit avec un bruit formidable. L’on aperçoit à sept à huit cents toises le mamelon où est établie la batterie républicaine dominant le terrain plan où s’avancent les cuirassiers. Ce mamelon est flanqué à sa gauche d’un bouquet de bois, et à sa droite de la métairie, dont la toiture vient de s’effondrer au milieu d’une immense gerbe de flamme et de fumée. Le grand-duc de Gerolstein, ne pouvant tourner la batterie, couverte à sa gauche par un bois, à sa droite par des bâtiments à demi embrasés, le grand-duc de Gerolstein dut aborder de front les bouches à feu qu’il s’agissait d’enlever, ne doutant pas qu’elles fussent soutenues par de la cavalerie ou par de l’infanterie, troupes que la disposition des lieux ne lui permettait pas d’apercevoir encore.

— La position de ces républicains est forte, monseigneur, — dit le comte de Plouernel, — et cependant il serait dangereux de tenter de la tourner.

— Je suis résolu de l’attaquer de front… je réponds de l’élan de mes cuirassiers, — reprit le prince. — Nous voilà à petite portée de canon… Ces gens-là ne tirent pas ?…

— Ils attendent que nous soyons plus proche, monseigneur, afin de rendre sans doute plus meurtrière leur décharge à mitraille.

— Rapprochons donc la distance afin d’engager l’action, — s’écrie le grand-duc dans sa bouillante ardeur… et, se tournant vers