Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 16.djvu/297

Cette page n’a pas encore été corrigée

vote des assemblées primaires, autre comédie ridicule et dérisoire. L’on soumettait à l’approbation des citoyens un fait accompli, que leur désapprobation aurait été impuissante à annuler ; puis la presse étant stipendiée ou bâillonnée, le droit de réunion aboli, aucun moyen ne restait aux patriotes pour éclairer l’opinion publique et la convaincre qu’un peuple a le pouvoir, mais non le droit d’aliéner à jamais sa propre souveraineté au profit d’une famille héréditaire, et de lier ainsi les générations à venir, absolument étrangères à cette aliénation qui les dépouille de leur souveraineté imprescriptible. Il fallut au nouvel empire un cortège de princes, de grands, de dignitaires, de maréchaux, etc., etc. Cette triste parodie de l’ancien régime indigna les gens de bon sens, mais imposa d’abord aux simples, par un pompeux appareil. Le clergé ne manqua pas de saluer le nouveau Clovis ; il vit dans son élévation à l’empire le doigt de Dieu ; il déclara : — « que la soumission était due à l’empereur Napoléon comme dominant sur tous, et à ses ministres, comme envoyés par lui, parce que tel était l’ordre de la Providence. »

Le pape Pie VII vint à Paris pour oindre et couronner le front de NAPOLÉON Ier, empereur des Français, par la grâce de Dieu, ni plus ni moins que Clovis, Charlemagne ou Hugues Capet, et le 2 décembre 1804, le nouveau potentat était sacré à Notre-Dame…

Les conséquences du rétablissement de la monarchie héréditaire en France ne se firent pas attendre. Napoléon, s’empara peu à peu de toutes ces républiques naissantes, écloses au souffle de la révolution, et les adjoignit à son empire, ou les octroya en apanage à sa famille. Une partie de l’Italie, incorporée à la France, fut donnée en vice-royauté au prince Eugène Beauharnais, beau-fils de l’empereur, et l’une de ses sœurs reçut en fief le duché de Modène. Le 11 avril 1803, une nouvelle coalition se forma entre l’Angleterre, l’Autriche et la Russie ; un moment préoccupé d’une descente en Angleterre, Napoléon abandonna ce projet plus qu’aventureux. Rappelé de Boulogne pour faire face à la guerre continentale, le 2 décembre 1805, Napoléon, toujours servi par son prodigieux génie militaire, gagna l’éclatante victoire d’Austerlitz, et la paix fut imposée à l’Autriche ; elle signa le 26 décembre à Presbourg, et fut réduite à d’énormes abandons de territoire. En 1806, le roi de Naples, ayant violé ses traités avec la France, fut dépossédé de son trône au profit de Joseph Bonaparte, l’un des frères de l’empereur. Peu de temps après, la république batave fut octroyée à Louis Bonaparte, autre frère de