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il s’élance à la tribune ; un coup de fusil part : il tombe sur les marches ; aussitôt vingt sabres sont levés sur lui et le frappent. On l’enlève, on le porte hors de la salle : c’est le jeune citoyen Mailly.


» Le représentant Féraud, qui était au pied de la tribune, se frappait la tête et s’arrachait les cheveux ; dans le même moment, des fusils couchent en jour le président. Féraud, qui s’en aperçoit, veut escalader la tribune pour aller couvrir le président de son corps ; un officier le soutient de son bras pour l’aider à monter ; l’un des séditieux le tire de son côté par son habit ; l’officier, pour lui faire lâcher prise, assène à cet homme un coup de poing sur la poitrine ; celui-ci, pour s’en venger, tire un coup de pistolet qui atteint Féraud ; il tombe.

» De nouveaux détachements d’hommes armés entrent dans la salle au pas de charge ; plusieurs d’entre eux couchent en joue le président (Boissy-d’Anglas, royaliste déclaré), il a la tête couverte ; il est impassible aux injures ; il reste dans l’attitude du calme et de la fierté, et ne paraît pas s’apercevoir du danger. Il invite la Convention à observer le plus profond silence.

» Cependant le tocsin sonnait au pavillon de l’Unité ; la cour, le jardin du Palais-National, tout était rempli de gardes nationales et d’artillerie. Les bataillons qui attendaient des ordres voyaient défiler, au milieu d’eux, des insurgés armés qui pénétraient dans la Convention sans qu’on sût ce qu’ils allaient y faire.

» Dans le sein de la Convention, on se dispute la parole ; tous les hommes qui y étaient entrés voulaient parler à la fois. Le bruit continue jusqu’à trois heures cinquante-cinq minutes, qu’on parvient à obtenir une sorte de silence.

» Un homme s’écrie : — « Représentants du peuple ! nous vous demandons la constitution de 93 et du pain !… »

» Il est interrompu par différents cris. Il reprend : — « Représentants du peuple, nous vous demandons ce que vous avez fait de nos trésors et de notre liberté ! »

» (La foule applaudit vivement. Les tambours battent.)

» LE PRÉSIDENT. — « Vous êtes dans le sein de la représentation nationale… »

» LA FOULE. — « Du pain ! du pain ! qu’as-tu fait de notre argent ? » (Ces cris dégénèrent en tumulte.)

» Un canonnier, placé à la tribune et entouré de fusiliers, fait lecture du plan d’insurrection qui a été placardé dans Paris la