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la représentation nationale, jusqu’alors toujours respectée, même au milieu des années si orageuses de 1793 et de 1794. Ah ! c’est qu’à cette époque, le peuple mettait sa foi, son espoir, sa confiance, son avenir, dans ses représentants ; mais depuis le 9 thermidor, l’Assemblée avait si audacieusement montré son esprit contre-révolutionnaire, que le peuple, affamé, dédaigné, repoussé, perdit toute mesure et envahit la salle des séances. Le côté gauche, composé des derniers républicains, opprimés, menacés par la réaction triomphante, et déplorant de plus en plus la chute de Robespierre, provoquée par leur implacable rivalité, fondèrent leur dernier espoir sur ce réveil du peuple et applaudirent à cette invasion. Bien qu’empreintes de partialité en faveur de la Convention, ces quelques lignes du Moniteur donnent l’expression exacte de la physionomie de l’Assemblée durant la journée du 14 germinal.

«… Un homme monte à la barre ; il demande le silence et parvient à l’obtenir. Cet homme est Vaneck, celui qui commandait la section de la Cité, à l’époque du 31 mai.

» Représentants du peuple, — dit-il, — vous voyez devant vous les hommes du 14 juillet, du 10 août et encore du 31 mai. (Les membres de l’Assemblée siégeant à l’extrémité gauche applaudissent à outrance.) Ils ont juré de vivre libres ou de mourir, ils maintiendront la constitution de 1793 et la déclaration des Droits de l’homme (Mêmes applaudissements à gauche.) Il est temps que la classe indigente ne soit plus victime de l’égoïsme des riches et de la cupidité des marchands. »

» LA FOULE. — « Oui ! oui ! »

» (Les représentants siégeant à l’extrémité gauche applaudissent vivement.)

» L’ORATEUR DU PEUPLE. — « Citoyens, mettez un terme à vos divisions, elles déchirent la patrie, et la patrie ne doit pas souffrir de vos haines. Faites-nous donc justice de l’armée de Fréron, de ces beaux messieurs à bâton. »

» LA FOULE. — « Oui ! oui ! »

» (Vifs applaudissements des membres de l’extrémité gauche.)

» L’ORATEUR DU PEUPLE. — « Les hommes qui, au 14 juillet, ont détruit la Bastille ne pensaient pas que, par la suite, on en élèverait mille autres pour incarcérer les patriotes. (Applaudissements de l’extrémité gauche.) Où sont passés tous les grains qu’a produits la récolte abondante de l’année dernière ? (Applaudissements à l’extrémité gauche.) La cupidité est à son comble, on méprise les assignats,