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son devoir, mais de quelques membres de ce tribunal, sur le patriotisme desquels vous devez prononcer aujourd’hui. »

ROBESPIERRE, avec l’indignation du mépris. — « Un Barère, perdu de vices, parler de sa pureté, oser m’accuser ! Je veux… »

DESMARAIS. — « Tu n’as pas la parole, scélérat ! Tais-toi ! »

VOIX NOMBREUSES. — « À bas le tyran ! »

VADIER. — « Je demande la parole ! »

COLLOT-D’HERBOIS. — « Le citoyen Vadier a la parole. »

ROBESPIERRE, exaspéré. — « Quoi ! lorsque tous m’accusent, l’on ne voudra pas m’entendre ! Je… »

FRÉRON. — « Paix, monstre ! »

VOIX NOMBREUSES. — « Parle, Vadier ! parle ! »

VADIER. — « Jusqu’au 22 prairial, je n’avais pas ouvert les yeux sur ce personnage astucieux qui a su prendre tous les masques et qui, lorsqu’il n’a pas pu sauver ses créatures, les a envoyées lui-même à la guillotine… j’ai nommé Robespierre. Personne n’ignore qu’il a défendu ouvertement Bazire, Chabot et Camille Desmoulins, et qu’il a déversé l’ignominie sur le rapport du comité de sûreté générale. (Applaudissements prolongés.) Le 22 prairial, le tyran… pour moi, c’est le nom que je lui donne (Applaudissements redoublés), le tyran a rendu lui-même une loi qui institue le tribunal révolutionnaire ; il l’a composé de sa main ; il a chargé le vigilant Couthon d’apporter ce décret à la Convention et de le faire passer, même sans l’avoir lu, et il se plaint de ce qu’on opprime les patriotes ? C’est à lui, au contraire, que s’applique ce reproche, lui qui a fait incarcérer le comité révolutionnaire le plus pur de Paris, lui qui, pour opérer les arrestations qu’il désirait, a institué la police générale. »

TALLIEN, bas, à Bourdon (de l’Oise.) — « Vadier perd du temps et ne formule pas la mise en accusation. (Haut.) Je demande la parole pour ramener la question à son véritable point. »

ROBESPIERRE. — « Oh ! je saurai bien l’y ramener, moi. (Il s’élance à la tribune, que Saint-Just lui cède.) Citoyens, au nom du droit, au nom de la justice, vous devez m’entendre. Je vous adjure de… »

BOURDON (de l’Oise). — « Tu n’as pas la parole. Tais-toi-et tremble ! »

Un tonnerre d’applaudissements accueille ces paroles de Bourdon (de l’Oise), et cette fois encore, Robespierre, malgré ses instances, ses prières, ne peut obtenir le silence. Sa voix épuisée se perd au