Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 16.djvu/108

Cette page n’a pas encore été corrigée

accusation des représentants du peuple qu’il a vaguement signalés aujourd’hui à la vindicte publique.

LE JÉSUITE. — Je demande la parole.

DURAND-MAILLANE. — Un mot encore afin de bien préciser la situation du parti royaliste que j’ai l’honneur de représenter ici. Nous n’avons pas sans hésitation consenti à nous coaliser contre Robespierre avec les montagnards et les terroristes dont mes honorables collègues Tallien et Fouché sont fondés de pouvoirs ; Robespierre, je le répète a toujours ménagé le côté droit de l’Assemblée ; il a tenté de sauver Son Altesse Royale Madame Élisabeth ; il a rendu au culte catholique ce qu’il pouvait lui rendre en ces malheureux temps ; il a jusqu’à présent sauvegardé les soixante-six députés girondins incarcérés comme suspects après le 31 mai. Donc si nous en croyions les apparences nous ne devrions pas nous liguer contre Robespierre ; mais après mûres réflexions, nous avons pensé que, homme de gouvernement avant tout, s’il ne reculait pas devant les mesures les plus terribles lorsqu’il les croyait utiles au salut public, Robespierre répugnait, non certes par compassion mais par politique, à verser inutilement le sang, parce que les rigueurs inutiles ou iniques devaient soulever l’opinion contre la république. C’est encore ainsi que, voyant la contre-révolution écrasée en Vendée, à Lyon, dans le Midi, le fédéralisme brisé, les armées françaises partout victorieuses, il croit non pas humain mais politique de ménager (quant à présent) les royalistes, à cette heure réduits à l’impuissance, mais résolu de les anéantir s’ils conspiraient de nouveau ; cette conduite est celle d’un véritable homme d’État. Or je le dis franchement, Vergniaud et ses amis, Danton et ses amis, Hébert et ses amis (il en était d’honnêtes parmi eux) ayant été guillotinés, la révolution a perdu à notre profit la plus grande portion de ses forces vives ; il ne reste, à bien dire que Robespierre et les jacobins capables de défendre, de conserver, d’affermir la république ; aussi entrons-nous dans une coalition dont l’unique but est d’envoyer à l’échafaud Robespierre et les principaux meneurs du parti jacobin.

DESMARAIS, au jésuite. — Vous avez la parole.

LE JÉSUITE. — Un mot d’abord pour confirmer de tout point ce que vient de dire le préopinant. J’arrive d’Angleterre et d’Allemagne : j’affirme qu’aux yeux de la coalition étrangère Robespierre est le seul homme dangereux de ce temps-ci ; j’affirme que les cabinets de Vienne et de Berlin déjà las de la guerre et épuisés par leurs sacrifices et par leurs défaites (je tiens le fait de M. le prince de Hardemberg),