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Jean Lebrenn, remarquant pour la première fois le canonnier, de qui le civisme l’avait si vivement touché un an auparavant, alors qu’il l’avait vu se présenter à la tente des enrôlements avec ses deux chevaux, se rappela bientôt ses traits et lui dit cordialement : — Citoyen, tu te nommes Jacques Duchemin. Tu étais cocher de fiacre en 1792. Tu es parti le 2 septembre à la frontière avec tes chevaux ?

— Oui, camarade, et d’où diable me connais-tu ?

— Je vais te l’apprendre durant notre trajet au quartier général, — répond Jean Lebrenn ; et bientôt, prenant le jésuite au collet, tandis que Duchemin conduisait le petit Rodin par la main, le volontaire et le canonnier sortent de la salle de l’auberge et se dirigent vers le bourg d’Ingelsheim.

— La capture de ces espions m’a empêché d’apprendre à l’ami Jean la découverte que je viens de faire au sujet de notre apprenti Olivier et de la citoyenne Victoria, — se dit Castillon, s’étendant sur la paille afin de se livrer au sommeil. — Jean ne va pas tarder de revenir au poste, j’aurai le temps de lui conter la chose avant la bataille de demain, où lui ou moi pouvons laisser notre peau… Dame ! ça s’est vu… Eh bien, quoi donc !… c’est pas si triste, pourvu qu’on ait le temps de crier : Vive la république !

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Lazare Hoche avait établi son quartier général dans la maison commune du bourg d’Ingelsheim ; des soldats et des sous-officiers des divers corps de l’armée servant d’ordonnances, prêts à porter des ordres, se tenaient dans une sorte de vestibule précédant une chambre réservée aux aides de camp des généraux Hoche et Pichegru, conférant en ce moment avec les représentants du peuple Saint-Just, Lebas, Randon et Lacoste, commissaires extraordinaires de la Convention auprès des armées du Rhin et de la Moselle. Parmi les différents plantons assis çà et là sur des bancs et sommeillant pour la plupart, vaincus par les fatigues de la journée, se trouvaient placés à