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ça n’est pas un de ces généraux comme Dumouriez, qui espèrent un jour abuser de leurs victoires et de leur armée pour jouer le rôle d’un Monck ou d’un Cromwell, afin de rebâter le peuple sous le joug royal ou de s’introniser eux-mêmes !… Non, non ! il n’est pas de meilleur patriote que Lazare Hoche : simple dans ses goûts, vivant de la ration des soldats, austère dans ses mœurs, d’une intégrité ombrageuse… C’est, en un mot, ainsi que l’appelle Carnot, un homme de Plutarque, et jamais la république n’aura de plus intrépide défenseur !

— Merci de ces renseignements, capitaine ; je suis tout fier d’être le soldat d’un pareil général, et maintenant il me semble qu’entouré de braves camarades comme vous, j’ai moins peur… d’avoir peur… — répond naïvement Duresnel. — Mais que viennent donc faire au quartier général les citoyens Saint-Just et Lebas ? J’avais ouï dire qu’il y avait déjà deux représentants du peuple auprès de l’armée, les citoyens Randon et Lacoste.

— Un aide de camp de Hoche m’a assuré ce soir que Saint-Just et Lebas venaient de Strasbourg, afin de s’entendre avec Lacoste et Randon pour réunir dans une seule main le commandement des deux armées du Rhin et de la Moselle, — reprend le capitaine Martin. — Cela serait préférable… il y a plus d’ensemble, plus de concert dans un commandement unique.

— Moi, — dit un volontaire, — je gagerais que Hoche sera choisi pour commander en chef.

— Moi, — reprit un autre, — je parierais pour Pichegru… il est ami de Saint-Just. Or, en sa qualité de membre du comité de salut public, Saint-Just est le plus influent des quatre représentants du peuple ici présents. Il fera donner le commandement en chef à son ami Pichegru…

—… À la condition expresse que son ami Pichegru soit le plus méritant, reprend le capitaine Martin. — Il suffit de connaître Saint-Just pour être certain qu’il sacrifiera toujours ses amitiés les plus chères à l’intérêt de la république.