Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/315

Cette page n’a pas encore été corrigée

la nécessité du 31 mai !… Les jacobins, depuis cette mémorable époque, maîtres du pouvoir enlevé aux mains débiles ou perfides de la gironde, les jacobins auront sauvé la France ! Nos armées battent et refoulent l’ennemi au nord, au midi et à l’est ; et tandis que les généraux girondins reculaient en deçà de nos frontières de défaites en défaites, les généraux montagnards, sous l’œil vigilant, inexorable des représentants du peuple, marchent de victoire en victoire. À l’intérieur, même succès en faveur des jacobins… La Vendée est presque entièrement soumise. Les agioteurs, terrifiés, n’osent plus spéculer sur l’accaparement des subsistances, elles ont repris leur cours normal. Les suspects détenus dans les prisons, si l’on en croit (et on doit les croire) les nouveaux vers de Vigée, se résignent gaiement à leur détention, jouent la comédie, nouent des intrigues galantes avec leurs belles compagnes de captivité, comédiennes de renom ou ci-devant grandes dames [1]. Grâce à cette incarcération temporaire des suspects, l’on n’entend plus circuler chaque jour les rumeurs alarmantes, les calomnies odieuses, les bruits perfides dont la conséquence immédiate était d’effrayer les esprits crédules et timides, de paralyser le crédit public et de jeter souvent la panique dans une partie de la population. Tous les cœurs maintenant renaissent à l’espérance. Cependant, malgré ces premiers résultats d’un

  1. Voir les Prisons de Paris, par Riouffe, contemporain des faits et contre-révolutionnaire exalté. D’après son aveu même, rien de plus enviable souvent que la vie des suspects dans leur prison. L’histoire de la révolution a pendant si longtemps été dénaturée, défigurée par les écrivains royalistes et libéraux, qu’il est accepté de dire que, pendant la terreur, les victimes se succédaient par milliers à Paris sur la place de la Révolution. Voici les faits : pendant les mois de novembre et de décembre 1793, cent vingt-six personnes furent exécutées à Paris, — cinquante-quatre en novembre et soixante-douze en décembre. Ce nombre, ajouté à celui des quatre-vingt-dix-huit sentences capitales prononcées par le tribunal révolutionnaire du 31 mai au 31 octobre, et aux quarante-et-un du tribunal criminel institué le 17 août 1792, donne un total de DEUX CENT SOIXANTE-CINQ individus suppliciés à Paris dans l’espace de seize mois et demi.
    Nous prenons ce relevé dans le journal intitulé : « Liste générale et très-exacte de tous les conspirateurs qui ont été condamnés à mort, etc. (1796). »