patriote qui, par ses vertus civiques et par l’élévation de son caractère, semble taillé sur le patron des hommes de Plutarque, me disait dernièrement Bouchotte ; car il connaît aussi Lazare Hoche ; celui-ci, fils d’un palefrenier de la vénerie de Louis XVI, s’est engagé soldat à seize ans dans les gardes françaises et, comme la plupart de ces braves soldats, a embrassé la cause populaire en 1789.
— Et quel est le sujet de cette lettre, mon ami ?
— Elle offre le triste et trop vrai tableau des déplorables intrigues qui souvent mettent aux mains des traîtres ou des lâches le commandement de nos troupes. Hoche, en ce moment surtout où l’action des armées va être si décisive, rend un grand service à la république, en dévoilant ces plaies honteuses dans la lettre que je vais te lire. Elle est adressée à Marat ; celui-ci la publie aujourd’hui dans son journal.
— Quoi ! mon ami, ce généreux jeune homme dont l’on estime tant le caractère et les vertus civiques ?… Lui… lui… oser écrire à Marat… à ce monstre ?
— Tu sais, Charlotte, l’aversion ou plutôt la pénible pitié que m’inspire la féroce aberration de Marat, lorsqu’il prêche l’extermination et la dictature d’un seul, mais j’ai toujours admiré en lui cette prodigieuse pénétration, ce rare et excellent bon sens politique dont il a donné tant de preuves, et qui ont été si utiles à la république ; enfin, l’éclatante justice qu’il rend aux patriotes, toujours certains de son appui, et l’infatigable persistance de ses dénonciations contre les traîtres expliquent l’immense et légitime influence qu’il exerce sur les esprits, et sur les meilleurs, les plus généreux esprits, témoin cette lettre de Hoche adressée à Marat.
— Ton appréciation impartiale devrait, mon ami, diminuer l’horreur que m’inspire cet homme effrayant, mais je ne peux la vaincre… Lis-moi donc cette lettre du capitaine Hoche, elle excite vivement ma curiosité.
Jean lut à haute voix la lettre suivante :