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et abordées à la baïonnette par des cents milliers de va-nu-pieds, endiablés de patriotisme et n’ayant à risquer que leur peau.

M. HUBERT. — J’ai acquis quelque connaissance des manœuvres militaires, et je l’avoue, des masses de Français, exaltés jusqu’à l’héroïsme, décidés au sacrifice de leur vie et conduits au feu par des généraux intrépides, peuvent opérer des prodiges… Comment se nomme l’auteur de ce rapport au comité de défense générale ?

LE JÉSUITE MORLET. — Son nom est, je crois, peu connu. C’est un certain général GRIMOARD… Or, vous voyez que, grâce à cette stratégie nouvelle, la république pourrait vaincre, refouler les nombreuses armées de la coalition… et ainsi sauver le présent… Or, le présent sauvé, l’avenir serait peut-être à jamais affermi par l’exécution du projet d’éducation, dont voici en peu de mots le résumé :

M. HUBERT. — En vérité, mon révérend, c’est attacher une grande importance à une question de maître d’école.

LE JÉSUITE MORLET. — Ah bah ! vraiment ?… Eh bien, savez-vous, monsieur Hubert, ce qui a failli donner à la compagnie de Jésus ce qu’elle obtiendra un jour : la domination du monde ?… C’est tout bonnement ce que vous appelez « une question de maître d’école… » en d’autres termes, le quasi-monopole de l’instruction publique… Donc, si vous avez des oreilles pour entendre et des yeux pour voir, voyez, écoutez et frémissez des suites que pourrait avoir pour l’avenir l’exécution de ce projet. (Le jésuite lit.) « La Convention nationale doit trois monuments à l’histoire : la Constitution, — le Code des lois civiles, — l’instruction publique et le mode d’instruction publique [1].

» L’instruction publique a été déjà l’objet d’une discussion intéressante. Le rapport de Condorcet est un chef-d’œuvre :

» Former des citoyens, propager les connaissances humaines, telles sont les deux parties du problème que nous avons à résoudre ; — la première constitue l’éducation ; — la seconde, l’instruction.

  1. Ce projet d’éducation nationale, dû au patriotisme éclairé de Lepelletier Saint-Fargeau, fut lu à la Convention par Robespierre, le 13 juillet 1793.