Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 15.djvu/17

Cette page n’a pas encore été corrigée

proclamations, a été saisie chez mon beau-frère. Le comité de sûreté générale doit avoir en ce moment les preuves flagrantes de la conspiration : donc il faut, selon moi, se hâter d’agir ; hier et avant-hier, j’ai vu beaucoup d’officiers et de grenadiers de mon ancien bataillon, très-influents dans leur quartier ; ils n’attendent que le signal de courir aux armes ; la bourgeoisie, la vraie bourgeoisie, a en horreur la république inaugurée par les massacres de septembre…

LE COMTE DE PLOUERNEL. — Avouez, monsieur Hubert, qu’il valait encore mieux, pour la bourgeoisie, se résigner à ce que l’on appelait : les privilèges exorbitants du trône, de la noblesse et du clergé, que de subir l’ignoble et sanglante tyrannie de la populace ?

M. HUBERT. — Monsieur le comte, une observation à ce sujet : vous avez, il y a quelques années, fait donner des coups de bâton, par vos laquais, à un homme que j’ai le malheur d’avoir pour beau-frère ; moi, à sa place, je vous les aurais rendus, non par procuration, mais directement, ces coups de bâton ! Or, tout grand seigneur que vous étiez, qu’eussiez vous fait, le cas échéant ?

LE COMTE DE PLOUERNEL. — Eh ! mon Dieu ! mon pauvre monsieur Hubert, si je ne vous avais pas, dans le premier moment de colère, passé mon épée à travers le corps, j’eusse été dans l’obligation de demander une lettre de cachet pour vous faire mettre à la Bastille.

M. HUBERT. — Parce qu’un homme de votre naissance ne pouvait condescendre à se battre avec un bourgeois ?

LE COMTE DE PLOUERNEL. — Évidemment, car le tribunal du point d’honneur, composé de nos seigneurs les maréchaux de France, auquel la noblesse déférait toutes ses affaires d’honneur, m’eût formellement défendu ce duel, et nous nous engagions par serment à toujours respecter les décisions du tribunal de messieurs les maréchaux.

L’ÉVÊQUE. — Il me semble que nous nous écartons du sujet de la délibération ?

M. HUBERT. — Point du tout, monsieur l’évêque, car enfin pourquoi conspirons-nous ? C’est pour renverser la république. Or, par