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enfoncer cette porte à coups de crosse de fusil. — Ce disant, l’avocat saisit l’un des chenets de la cheminée, donne lui-même l’exemple du bris de la porte en attaquant ses panneaux avec furie, et criant au commissaire : — Que deux de vos hommes descendent dans la cour, un petit escalier donne sous la voûte de la porte cochère…

— La porte cochère est gardée, — répond froidement le commissaire, — la petite porte du jardin aussi est gardée, quoiqu’on l’ait trouvée ouverte. Le prévenu Hubert s’était, grâce au brouillard, dérobé à la poursuite de mes agents ; mais, instruits par un boutiquier voisin de cette maison, qu’un homme vêtu d’une houppelande grise et coiffé d’un chapeau à larges bords rabattus était entré céans, ils sont venus me quérir à la section.

— Dieu soit loué ! — s’écrie l’avocat, — le traître ne pourra s’échapper !

— Allez toujours recommander à nos gens de redoubler de surveillance, — dit le commissaire à deux de ses hommes. Ils sortent précipitamment ; la porte de la chambre à coucher, dont l’épaisseur et la solidité ont longtemps résisté à la crosse de fusil des gendarmes et aux coups assénés par l’avocat lui-même, la porte tombe enfin : il pénètre dans la chambre avec plusieurs soldats, et bientôt rentre au salon, et s’écrie : — Personne ! — Puis il se rassure se disant : — Heureusement, la porte cochère et celle du jardin sont gardées, Hubert ne pourra s’échapper, sinon je frémirais des suites que pourrait avoir pour moi cet événement… Le commissaire est l’ami de Marat ; il me dénoncerait comme complice de l’évasion de mon beau-frère.

Soudain, l’un des deux agents remonte essoufflé, s’écriant du seuil de la porte :

— Trahison ! notre homme s’est échappé !

— Enfer ! — reprend l’avocat en frappant du pied, et il ajoute : — Cette évasion est impossible, les deux seules issues de la maison étaient gardées !