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pourquoi combattaient-elles ? Pour la défense de la patrie ? Non ! puisque la plupart des nations appelaient l’affranchissement et la république ; les armées ennemies se battaient donc pour défendre, quoi ? La couronne de leurs maîtres et les castes privilégiées.

Telles furent, pour le présent et pour l’avenir, les immenses conséquences morales de la victoire de Valmy, remportée le 20 septembre 1792, la veille de la proclamation de la république.


Enfin ! fils de Joël, enfin il est venu ce beau jour, prédit, il y a seize siècles et plus, à notre aïeul Scanvoc’h-le-soldat par Victoria la Grande, saint espoir qui a soutenu d’âge en âge le courage de nos pères à travers tant d’épreuves ! Elle est enfin renouée, notre antique tradition républicaine, qui remonte au berceau de la Gaule, notre mère patrie ; elle est enfin anéantie, cette exécrable royauté franque, imposée par Clovis à la nation faite esclave au nom du droit de conquête, de pillage et de massacre ; conquête, pillage, massacre, esclavage, bénis, consacrés dans la personne de Clovis, ce bandit couronné, sacré à Reims par les évêques des Gaules, tous complices de l’invasion et de l’asservissement de la mère patrie, dont ils se partageaient avec les conquérants les dépouilles : terres, biens et habitants !

La voici donc enfin accomplie cette vision de Victoria la Grande ! 


La Gaule affranchie, foulant d’un pied libre ses fers brisés, la tiare des papes et la couronne des rois.

Merci, Dieu ! je puis mourir ; je l’ai vu ce jour de triomphe, qui couronne quinze siècles de luttes, soutenues par nos pères opprimés contre leurs oppresseurs, par les esclaves, les serfs, les vassaux, contre les rois, la seigneurie et le clergé ; par les descendants des Gaulois conquis contre les descendants des Francs conquérants.

Merci, Dieu ! je puis mourir : la Gaule était esclave, je la vois souveraine !