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tons-nous cent en face d’eux, armons-les comme nous de sabres, de piques, et bûchons-nous à mort ! Nous combattons pour la liberté, nous serons vainqueurs !

Cette proposition d’une sauvage énergie (qui devait plus tard se reproduire), a été consignée dans les écrits royalistes, au sujet de ces déplorables journées ; cette proposition, qui substituait du moins au massacre le champ-clos et des armes égales, fut accueillie par les acclamations de la majorité des auditeurs ; j’allais, à tout hasard, l’appuyer, de deux maux choisissant le moindre, lorsqu’un citoyen, haletant, s’élance sur le banc, à côté du forgeron, et s’écrie :

— Je sors de l’Assemblée… l’on vient d’y apporter les nouvelles les plus graves ! !

— Parlez, parlez ! — s’écrie la foule, cédant à la fiévreuse mobilité des angoisses de toute nature dont elle était tourmentée. Les prisonniers furent un moment oubliés, et plusieurs voix s’adressant au nouveau venu : — Parlez, parlez ! — Silence ! — Écoutons !

— Lorsque les commissaires de la commune ont donné lecture de ses décrets à l’Assemblée, Vergniaud s’est écrié : « Je reconnais Paris au courage de sa démarche ! et maintenant on peut dire que la patrie est sauvée ! » Il a appelé Longwy, qui s’est rendu aux Prussiens, la ville des lâches !

— Bien dit ! — C’est vrai ! — Bravo ! — Vive la nation !

— Et Vergniaud, entendant au loin le refrain de la Marseillaise, s’est écrié : « C’est assez chanter la liberté, il faut la défendre. Ce ne sont plus des rois de bronze qu’il s’agit de renverser, ce sont les despotes de l’Europe ! »

— Oui ! oui ! mort aux tyrans ! — Mort au despotisme !

— Vergniaud a terminé son discours par ces admirables paroles : « Je demande que l’Assemblée, en ce moment corps militaire plus que législatif, envoie à l’instant, et chaque jour, douze commissaires au camp retranché du champ de Mars, non pour exhorter