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Le choix de ces ministres, y compris Dumouriez (son intérêt du moment répondait de lui), le choix de ces ministres était excellent. Mais impuissant à conjurer la trahison des généraux et la défection des officiers aristocrates, commandant sous leurs ordres, et cela au moment où la coalition, de plus en plus menaçante, demandait impérieusement, par un second manifeste non moins insolent que celui de Pilnitz, — le rétablissement de la monarchie sur les anciennes bases ; — la restitution des biens du clergé ; — et du comtat Venaissin au pape, etc., etc., — sinon la coalition menaçait la France de la guerre… Cette audacieuse injonction, évidemment concertée avec Louis XVI, afin d’exaspérer l’opinion publique, atteint le but que l’on se proposait ; et, le 19 avril 1792, l’Assemblée répond au manifeste des rois étrangers en déclarant la guerre à l’Autriche… Les prévisions de Robespierre se réalisent, et huit jours après l’entrée en campagne (29 avril 1792) le corps d’armée du comte Théobald de Dillon, après un premier engagement, se débande devant les coalisés ; des officiers royalistes, au lieu de rallier leurs soldats, poussent le cri de sauve-qui-peut, provoquant ainsi la panique des troupes ; elles fuient en pleine déroute. L’étranger envahit nos frontières, et le cœur de la France est menacé par les despotes étrangers triomphants à leur début…

La trahison si évidente de Louis XVI et des officiers aristocrates soulève l’indignation publique ! Les girondins, reconnaissant enfin le piège où leur patriotisme est tombé, ont recours à quelques moyens timidement révolutionnaires. Ils exilent par décret les prêtres réfractaires, coupables d’appeler la guerre civile, et jusqu’alors protégés par le veto royal, qui rendait illusoire le décret dont les avait frappés l’Assemblée. Enfin, l’Assemblée décrète la dissolution des gardes soldées de Louis XVI, ardents contre-révolutionnaires, et ordonne la formation d’un camp de vingt mille hommes sous Paris, devant à la fois servir d’armée de réserve et couvrir la capitale menacée par l’étranger. Mais Louis XVI, encouragé par la première