Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 13.djvu/86

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nepont, malgré sa prétendue conversion à la religion catholique, assistait secrètement, ainsi que plusieurs de ses coreligionnaires, au prêche d’un pasteur. M. Rennepont, dénoncé par les jésuites, encourait les peines terribles prononcées contre les relaps : les galères perpétuelles et la confiscation de ses biens. À cette même époque, son fils unique, pour l’amour duquel il avait feint d’abjurer, succomba dans un duel sans témoin… Son père, ne tenant plus à la vie, résolut de terminer ses jours, autant par le chagrin d’avoir perdu son enfant bien-aimé que pour échapper à la peine des galères. Il pouvait, il est vrai, tenter de se soustraire par la fuite à ce châtiment infamant ; mais, désespéré de la perte de son fils et fatigué de l’existence, il préférait la mort à un bannissement volontaire ; il se réfugia donc momentanément dans une maison distante de quelques heures de Paris, manda secrètement près de lui mon aïeul Samuel, lui confia ses volontés dernières et son testament. La confiscation des biens du relaps était, par arrêt royal, abandonné à leurs délateurs. Les jésuites bénéficièrent donc de la fortune de M. Rennepont. Celui-ci, depuis longtemps préoccupé de laisser à son fils, quoi qu’il advînt, un certain patrimoine, avait enfoui cinquante mille écus en or dans une cachette. Il confia cette somme à mon aïeul, le priant de racheter de la confiscation cette maison où nous sommes (alors estimée environ sept à huit mille écus). Samuel devait en outre remplir certaines instructions relatives au corps de logis principal de cette demeure et habiter gratuitement, ainsi que sa descendance, le bâtiment où je loge aujourd’hui.

» Enfin, le surplus du dépôt remis aux mains de mon aïeul, et montant à quarante mille écus, devait être placé par lui à intérêt aussi sûrement que possible : les sommes provenant de ce placement seraient capitalisées et accumulées durant un siècle et demi environ ; à savoir, jusques en l’année 1832. Samuel devait prélever annuellement deux mille livres sur le produit de ces placements