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En 1665, le président d’Aligre vient de nouveau exposer la détresse de son royal maître. — « Les réservoirs de Sa Majesté sont vuides et secs, — dit le financier aux abois. — C’est à vous, messeigneurs, de déterminer la somme que vous octroyerez, et qui les remplira d’une bienfaisante rosée (les réservoirs de Sa Majesté). » — Le clergé, peu sensible à l’humide métaphore, répond que : — « Sans doute, Sa Majesté a déjà beaucoup accordé pour le triomphe de la vraie religion, mais point encore assez. L’hérésie agonise ; il faut qu’elle meure. » Et, cette fois, l’assemblée cléricale formule ainsi ses exigences en manière de projet d’édit rédigé d’avance[1].

« Art. 1er. — Qu’il ne soit plus permis aux catholiques de renoncer à leur religion, pour professer la religion réformée. »

Louis XIV répond en marge du projet :

Sa Majesté s’est réservé d’examiner.

« Art. 2. — Que les universités, académies, collèges où les réformés enseignent les belles-lettres et leur théologie soient supprimés. »

(En marge) : Sa Majesté y pourvoira.

« Art. 6. — Que les charges de judicature royale soient uniquement possédées par les catholiques, comme aussi celles des commis des bureaux. »

(En marge) : Sa Majesté y pourvoira.

« Art. 7. — Que les biens que possèdent les consistoires des protestants leur soient ôtés. »

(En marge) : Renvoyé devant les commissaires pour être examiné.

« Art. 18. — Que Sa Majesté retirera les fermes de son domaine qui ont été baillées par engagement des protestants, qui trouvent ainsi l’occasion de pervertir les sujets de Sa Majesté. »


  1. Nous engageons nos lecteurs à consulter à ce sujet le hardi et beau livre de M. Lenfrey : La Philosophie et l’Église au dix-huitième siècle. Jamais la saine raison n’a été servie par plus de verve, plus de savoir et plus de consciencieuse indignation contre le fanatisme.