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les sacrements, et ce luxurieux sycophante, de nouveau possédé de la peur du diable, voulut bien déclarer que — « quoiqu’il ne dût compte de ses actes qu’à Dieu seul, il se repentait d’avoir causé du scandale à ses sujets. » — Après quoi, il trépassa le 10 mai 1774, à l’âge de soixante-quatre ans, après cinquante-neuf ans de règne. Sa mort causa un allégement général. Son cercueil, conduit à Saint-Denis, fut couvert d’imprécations, de huées, ainsi que l’avait été le cercueil de son aïeul le grand roi.


Louis XVI monte sur le trône le 11 mai 1774. Cet homme offre un exemple terrible des fautes, des malheurs, des crimes résultant de la faiblesse, de l’indécision, de la fourberie et de la lâcheté du caractère, jointe à l’éducation monarchique et à cette conviction inébranlable : « Qu’un roi étant d’une essence supérieure à celle du commun de l’humanité, en lui réside toute autorité, et que lui seul enfin a le droit, le pouvoir, d’améliorer le sort de ses peuples, mais ceci à son temps, à sa convenance, à sa mode, et dans de certaines mesures et limites qu’il appartient à sa souveraineté de fixer inexorablement, sans jamais souffrir qu’elles soient outrepassées. » En effet, quoique ce prince fût doué de quelques qualités, elles furent pour la plupart forcément viciées par la nature même de sa condition royale ; mais l’honnêteté de ses mœurs privées, ses vertus domestiques demeurèrent intactes. Néanmoins, en raison même de sa personnalité royale, quoiqu’il fût humain et que souvent il eût de généreuses aspirations vers le bien, il fit fatalement le mal : il commit des attentats irrémissibles, il fit couler le sang des citoyens sous le sabre de ses soldats, il tenta de dissoudre par la force la représentation nationale, il fut traître à la foi jurée, il commit enfin le plus grand des crimes… il pactisa secrètement avec les rois étrangers, appelant à son aide leurs armées pour imposer à son peuple le maintien séculaire de privilèges odieux,