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de lutter contre l’influence de l’évêque de Soissons, confesseur du roi, lequel confesseur s’opiniâtrait à refuser les sacrements à son pénitent s’il ne renvoyait madame de Châteauroux. La peur du diable triomphant de l’amour chez le royal moribond, la maîtresse en titre et sa compagne d’adultère, la duchesse de Lauraguais, sa sœur, durent quitter Metz accompagnées des imprécations populaires. La conversion de Louis XV dura ce qu’elle pouvait durer… le temps de revenir à la santé ; à peine l’eut-il recouvrée qu’il rappela de l’exil madame de Châteauroux, mais elle mourut bientôt ; les velléités guerrières de Louis XV s’éteignirent cette fois avec sa maîtresse : il revint à Versailles après un acte d’apparition devant son armée. Le duc de Richelieu, en sa qualité si bien justifiée « d’entremetteur du roi, » lui donna une nouvelle maîtresse, espérant faire d’elle sa créature et user à son profit de cette influence d’alcôve. Il avait découvert dans une maison suspecte de Paris une certaine Jeanne Poisson, fille putative d’un boucher banqueroutier, et bâtarde d’un fermier général, Lenormand d’Étiolles. La mère de cette jeune fille, belle et douée de séductions remarquables, l’élevant dans l’unique intention de la prostituer au roi, l’avait dressée à la volupté comme une courtisane antique, et cherchait tous les moyens d’attirer sur sa progéniture les regards de Louis XV. Elle y réussit par l’intermédiaire du duc de Richelieu. Celui-ci l’ayant fait remarquer à son maître lors d’un bal de l’Hôtel de Ville, elle fut bientôt maîtresse en titre, et prit le nom de marquise de Pompadour. Elle dépassa ses devancières en insolence, en faste, en ruineuses prodigalités. Louis XV, ayant une fois manifesté la volonté de se mettre à la tête de ses armées, dut s’y résoudre pour satisfaire à l’opinion publique, et, hasard étrange ! le roi, non moins couard que Charles VI, fut témoin (sans le moindre danger d’ailleurs pour sa peau) de la bataille de Fontenoy, gagnée par le maréchal de Saxe, le 20 mai 1745. Les suites de cette victoire furent funestes aux Anglais et aux coalisés ; ils perdirent les avantages remportés dans les