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France, après la prise de la Bastille, demandait une répression violente, impitoyable contre ce qu’il appelait modestement : l’émeute. Robespierre monte à la tribune et de sa voix ferme et grave :

« — Qu’est-il donc arrivé qui autorise M. de Lally-Tollendal à sonner le tocsin ? On parle d’émeute ? Cette émeute, messieurs, c’est la liberté ! Ne vous y trompez pas, le combat n’est point à sa fin. Demain peut-être se renouvelleront contre l’Assemblée des tentatives funestes ? Et qui les repoussera, si, d’avance, vous déclarez rebelles ceux-là qui se sont armés pour notre salut ! »

Ô fils de Joël ! Robespierre disait une vérité profonde ! ! « Cette émeute… c’était la liberté. » C’était la destruction prochaine du vieux monde monarchique, féodal et théocratique ! Il disait vrai… le combat n’était pas fini ! ! le canon de la Bastille donnait le signal de cette grande bataille ! Déjà la droite et inflexible raison de Robespierre perçait à jour et à fond l’arrière-pensée des monarchistes, qui, sous prétexte de réprimer l’émeute, voulaient désarmer le peuple, gardien vigilant, défenseur intrépide de la révolution naissante ! L’émeute fut féconde. Elle porta ses fruits, et ce que leurs obscurs précurseurs avaient, au prix de leur sang, tenté d’âge en âge, non sans succès partiels, ainsi que vous l’avez vu, fils de Joël, les émeutiers de juillet 1789 l’obtinrent dans la fameuse nuit du quatre août. La noblesse et le clergé, épouvantés du soulèvement général de la nation contre leurs privilèges séculaires, dont le peuple insurgé livrait aux flammes les titres odieux, se résignèrent au sacrifice que leur imposait la nécessité ; mais… innocente satisfaction, ils voulurent paraître faire hommage à la patrie et à l’humanité de ces droits qu’il n’était plus en leur pouvoir de conserver. Le vicomte de Noailles monta le premier à la tribune et proposa l’abolition complète de certains droits seigneuriaux, la rédimation pécuniaire de certains autres par les citoyens qui en subissaient la charge ; et, séance tenante, furent décrétées les mesures suivantes :