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roi, est roué vif ; mais il a donné l’exemple de la révolte : elle se propage et s’étend bientôt dans toutes les Cévennes et dans le Vivarais ; une guerre de partisans, infatigable, acharnée, souvent victorieuse, est déclarée aux troupes de Louis XIV. Les révoltés nomment des capitaines. Les deux plus célèbres sont Roland et Jean Cavalier. Celui-ci, à peine âgé de dix-sept ans, mais doué d’un remarquable génie militaire, lève et discipline une armée de cinq à six mille hommes, prenant le nom d’Enfants de Dieu. Les grottes de montagnes inaccessibles leur servent de citadelles, de retraites et d’arsenaux. Jean Cavalier lève la dîme sur les catholiques ; et, usant de représailles après tant d’années de persécution, il incendie les églises, ravage les monastères, tient avec succès la campagne contre les troupes de Louis XIV, les bat en plusieurs rencontres. Basville, intendant du Languedoc, demande instamment des renforts, voyant l’insurrection descendue des montagnes envahir tout le plat pays, depuis Nîmes jusqu’à la mer. Le comte de Broglie est envoyé à la tête d’un corps d’armée ; il est taillé en pièces par Jean Cavalier, près de Vistre, le 12 janvier 1703. Les victoires des Cévenols exaspèrent et épouvantent Louis XIV. Croyant écraser la révolte d’un seul coup, il lance contre elle un nouveau corps d’armée considérable, sous le commandement d’un maréchal de France, Montrevel. Ces troupes, choisies parmi les meilleures des armées d’Allemagne et d’Italie, sont accompagnées de vingt pièces d’artillerie et de cinq cents miquelets du Roussillon, habitués à la guerre des montagnes. Le maréchal de Montrevel est battu par Jean Cavalier, ainsi que l’a été le comte de Broglie. Le maréchal se décourage, son armée se démoralise, il demande un armistice. Jean Cavalier refuse et met en déroute l’armée royale dans de nouvelles rencontres. Basville imagine d’enrégimenter des catholiques sous le titre de Cadets de la Croix et de les opposer aux insurgés protestants ; mais les Cadets de la Croix, commandés par un ermite muni d’indulgences papales, pillent, massacrent ennemis et amis, catholiques et réformés, commettent enfin