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députés lui appartenaient. Mais il advint ceci : les idées républicaines, propagées d’abord en toute conviction par les protestants, puis par la Ligue, qui s’en faisait à la fois une arme contre Henri III et une amorce pour séduire le populaire, les idées républicaines avaient tellement gagné les esprits, que les États généraux réunis à Blois soulevèrent les questions les plus hostiles, non point seulement à Henri III, mais au principe monarchique lui-même. Ainsi le tiers-état et une fraction de la noblesse affirmaient et déclaraient :

Que la souveraineté appartenait aux États et non au roi.

Qu’il fallait procéder envers le souverain, non par supplications, mais par résolutions.

Enfin, que le roi n’était que le président des États, lesquels ont tout pouvoir[1].

N’était-ce pas implicitement affirmer le gouvernement républicain que de réduire la royauté de droit divin à cette position subalterne, ainsi que l’avait tenté courageusement Étienne Marcel au quatorzième siècle ? Ces attaques contre le principe monarchique, formulées par les États de Blois, furent accompagnées des blâmes les plus véhéments contre la dilapidation des deniers publics et les prodigalités de la cour. Les États déclarèrent fermement leur résolution de ne point accorder de nouveaux subsides sans garantie de leur bon emploi. Henri III, courroucé, mais alarmé de ces hostilités, crut y voir, et il se trompait, non la tendance générale de l’esprit public, mais une manœuvre du duc de Guise ; aussi, dans l’espoir de la déjouer, il profita de la réunion des États pour réitérer son adhésion à la Ligue, et prononça un discours fort habile, qu’il termina en disant : « que l’hérésie eût été déjà complètement exterminée en France, s’il n’eût été prévenu et empêché par l’ambition démesurée de quelques-uns de ses sujets. » C’était désigner clairement le duc de Guise, assis au pied du trône. Le lendemain, le Balafré fit

  1. Pasquier, t. II, col, 361.— Mémoires de Cheverni, p, 490. — Palma-Cayet, introd., p. 76.