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tiemment votre retour pour prendre une résolution qui, je vous l’ai dit, doit se rapporter à quelque projet de voyage. Enfin, lorsqu’elle me parle de défunte sa bonne mère madame la comtesse, et cela arrive bien souvent, mademoiselle… voici encore ce qui me semble inexplicable… mademoiselle parfois s’exprime au sujet de sa mère comme si elle devait prochainement la revoir… Alors, les grands yeux noirs de ma pauvre Berthe deviennent si brillants, si brillants, que je ne peux en soutenir l’éclat ; son beau visage resplendit d’une beauté vraiment céleste, et… — Mais, s’interrompant soudain, Marion dit au vieil écuyer : — Silence, voici mademoiselle !…


Mademoiselle de Plouernel entre lentement dans le salon ; elle est, ainsi que l’a dit Marion, elle est plus fraîche, plus belle qu’elle ne l’a jamais été ; elle est entièrement vêtue de blanc. Le vieil écuyer s’incline respectueusement et dit à sa maîtresse, qui, en l’apercevant, fait un mouvement de surprise :

— Je ne me suis pas hâté de me présenter devant mademoiselle, parce que, malheureusement, les nouvelles que j’apporte…

— Sont fâcheuses ?

— Oui, mademoiselle.

— Laisse-nous, bonne Marion, — dit mademoiselle de Plouernel à sa nourrice. Celle-ci sort, et Berthe, s’adressant au vieil écuyer avec bonté : — Je regrette d’autant plus la peine que je vous ai donnée, Du Buisson, que cette peine devait être infructueuse. — Et s’asseyant, la jeune fille ajoute : — Ne restez pas debout ; vous devez être fatigué, après ce long voyage…

— Mademoiselle…

— Asseyez-vous, je vous en prie… — Et le vieillard, par respect, hésitant encore à obéir, Berthe répète : — Asseyez-vous, je l’exige.

Du Buisson s’assied ; sa maîtresse reprend :

— Ainsi, vous rapportez ma lettre ?