Page:Sue - Les Mystères du peuple, tome 12.djvu/313

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

m’a dits, elle attend votre retour pour prendre une résolution… Quelle est-elle ? Je l’ignore…

— Peut-être veut-elle quitter pendant quelque temps la France, voyager à l’étranger ?

— Je crois en effet qu’il s’agit d’un voyage ; plusieurs fois mademoiselle m’a dit que nous étions ici seulement en pied-à-terre…

— Enfin, c’est là l’important, elle est beaucoup moins triste et sa santé est bonne ?

— Oui, sa tristesse semble disparue, sa santé est excellente… et cependant, Du Buisson, que vous dirai-je ? je me sens parfois cruellement inquiète au sujet de mademoiselle…

— Pourquoi inquiète ?

— Je ne sais… c’est comme le pressentiment d’un malheur.

— D’un malheur qui menacerait mademoiselle ?

— Oui.

— Mais encore, de ce pressentiment quelle serait la cause ?

— J’ose à peine vous l’avouer, tant je vais vous paraître sotte… Vous vous moquerez de moi…

— Rien de ce qui touche notre jeune maîtresse ne peut, Marion, prêter à la raillerie… Expliquez-vous, de grâce ?

— Vous allez blâmer ma crédulité…

— Votre crédulité à quoi ?

— Aux charmes !… à la magie !

— Comment, à votre âge, vous donnez dans ces contes bleus ?

— Non, non, ce serait absurde… et pourtant, malgré moi, je…

— Achevez…

— Soit. C’était donc très-peu de temps après votre départ, ma pauvre Berthe, à peine délivrée de sa fièvre, semblait encore assez triste ; un jour, mademoiselle, me parlant avec sa bonté ordinaire de ma famille, qui, vous le savez, habite Vannes, me demandait si quelqu’un des miens n’avait pas besoin d’être secouru ; je lui réponds que mon frère, petit marchand, trouvait dans son commerce de