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La Ligue fut dissoute, mais grâce à d’énormes sacrifices pécuniaires ; il fallut y pourvoir, ainsi qu’aux nécessités de la guerre avec l’Espagne et aux détestables prodigalités du Béarnais envers ses innombrables maîtresses, sans parler de son goût forcené pour les jeux de hasard, où il perdait des sommes considérables. Il confia l’administration des finances à Sully, homme intègre, ordonné, esprit droit, rigide et calculateur, dévoué au bien public et résolu de le poursuivre avec l’inflexibilité de son caractère entier. Chargé par le roi de s’enquérir personnellement de l’état des finances, il trouva partout le désordre, la rapine organisée par les gens du fisc, les gouverneurs ou autres, qui emboursaient le plus clair du revenu des impôts ; Sully trancha inexorablement dans le vif de ces plaies honteuses ; s’il n’allégea que de peu le poids écrasant des taxes, il parvint du moins à faire rentrer intégralement leur produit dans le trésor public et l’employa au service du pays. Sully blâma souvent avec sévérité les folles dépenses du Béarnais, qui prodiguait l’or de la France à ses courtisanes et aux bâtards qu’elles procréaient. Il légitimait ces fruits de l’adultère avec une naïveté d’impudeur, avec un cynisme, qui sembleraient incroyables, impossibles, si l’acte de légitimation de l’un des bâtards de ce prince ne prouvait à quel degré d’aberration du sens commun et du sens moral peuvent atteindre les rois les plus favorablement doués ! Quoi d’étonnant ? enivrés de leur toute-puissance, foulant aux pieds les lois qui régissent le commun et se croyant d’une espèce supérieure au vulgaire des hommes, ils proclament honorables et dignes des faits indignes et déshonorants aux yeux de tous. Lisez, fils de Joel, et vous ne vous étonnerez pas de ce que l’idée républicaine, toujours progressant, ait continué de couver dans un grand nombre d’esprits, même sous le règne du Béarnais, excellent roi si on le compare à ses devanciers.

« Henri, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre, à tous présents et à venir, salut.

» Nous estimons pouvoir véritablement dire avoir, autant que nul