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emmenant à dessein l’une de ses filles d’honneur d’une rare beauté, mademoiselle de Kéroualle… Or, dans quel but la duchesse d’Orléans se faisait-elle accompagner de cette belle personne ?… C’était afin de la livrer au roi Charles, en retour de sa déclaration de guerre aux Hollandais…

— Permettez, ma nièce…

— Madame, j’ai parlé de plusieurs infamies… Ai-je trop dit ? comptons ; Spéculant sur les mœurs dissolues du roi d’Angleterre, Louis XIV envoie sa belle-sœur, madame la duchesse d’Orléans, remplir le métier de… En vérité, je rougis… mais quel terme employer, sinon celui d’entremetteuse ?… Est-ce assez infâme ?… cette princesse s’abaissant à cet ignoble commerce ! Auprès de qui ?… de son frère… N’est-ce pas doublement infâme ?

— Encore une fois, ma nièce… je…

— Enfin, mademoiselle de Kéroualle, complice de ces ignominies, se vend au roi d’Angleterre, et accepte, pour prix de son public opprobre, le duché de Portsmouth… Est-ce assez infâme ?

— Vous oubliez que…

— Il est vrai, madame, j’oubliais qu’un prince de l’Église catholique, l’évêque de Meaux, Bossuet, a osé dire, dans la maison de Dieu, en présence de la cour assemblée pour entendre l’oraison funèbre de madame la duchesse d’Orléans : « qu’elle s’en était allée s’acquérir deux puissants royaumes, par des moyens agréables, et que sa vertu était sa seule médiatrice entre les deux rois. » Un pareil langage est-il assez inf… ; mais non, je n’achève pas, par respect pour le caractère auguste dont est revêtu l’homme qui a prononcé ces paroles inouïes en présence d’une tombe à peine fermée.

La marquise du Tremblay, après avoir témoigné son sincère éton-